Les récents bouleversements en Syrie, avec la chute soudaine du régime de Bachar al-Assad face à l’offensive éclair des rebelles, sont en train de redessiner la donne géopolitique régionale. Au Liban voisin, cette nouvelle donne pourrait bien sonner le glas pour le Hezbollah, le puissant mouvement chiite allié de longue date au régime syrien. C’est en tout cas l’avis de Samir Geagea, le chef des Forces Libanaises, principal parti chrétien du pays.
Le Hezbollah dos au mur après le départ d’Assad
Lors d’une conférence de presse, Samir Geagea n’a pas mâché ses mots à l’encontre du Hezbollah : « La partie est finie, chaque jour qui passe est un jour perdu pour vous ». Pour ce farouche opposant à l’influence syrienne qui a lui-même passé 11 ans en prison durant la tutelle de Damas, la chute d’Assad et le retrait des troupes du Hezbollah de Syrie marquent un tournant.
Le mouvement chiite se retrouve en effet considérablement affaibli. Décapité et éprouvé après plus d’un an de guerre ouverte avec Israël, il doit aussi faire face au mécontentement croissant de sa base. Selon Samir Geagea, celle-ci aspire aujourd’hui à « un véritable État » et à la « reconstruction » après les destructions massives causées par les frappes israéliennes dans les fiefs du Hezbollah.
Israël et les adversaires du Hezbollah savourent
De l’autre côté de la frontière, c’est peu dire qu’on se réjouit de la déconfiture du Hezbollah. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu y voit « une conséquence directe » de l’action de son pays contre l’Iran et ses alliés. La perte du soutien stratégique d’Assad est indéniablement un coup très dur porté à « l’axe du mal » dénoncé par Israël.
Au Liban même, les adversaires du Hezbollah, à commencer par les Forces Libanaises, ne cachent pas leur satisfaction. La fin de la domination syrienne ravive l’espoir d’un rééquilibrage politique dans le pays du Cèdre. Dans les régions sunnites et chrétiennes, des scènes de liesses ont accueilli l’annonce de la chute du « tyran » de Damas.
Le Hezbollah appelé à déposer les armes
Fort de ce nouveau rapport de force, Samir Geagea somme le Hezbollah de rendre les armes. Il l’invite à établir avec l’armée libanaise « une feuille de route visant à démanteler son infrastructure militaire ». Un appel qui résonne avec une acuité particulière à l’approche de l’élection présidentielle prévue en janvier prochain.
Le poste de chef de l’État est vacant depuis plus de deux ans, les divergences entre le Hezbollah et ses adversaires ayant bloqué le scrutin jusqu’ici. Avec le nouveau contexte régional, le rapport de force est en passe de changer. Affaibli militairement et privé de son principal allié, le Hezbollah peut-il continuer à dicter sa loi ? Rien n’est moins sûr.
L’avenir incertain du Hezbollah
Si les pressions s’accentuent sur le mouvement chiite pour qu’il désarme, ce scénario est loin d’être acquis. Malgré son affaiblissement, le Hezbollah conserve une puissance de frappe conséquente et bénéficie toujours de solides appuis, notamment de la part de l’Iran. Son emprise sur la vie politique libanaise reste forte.
Toutefois, le parti de Dieu est bel et bien arrivé à un tournant de son histoire. Lui qui a bâti sa légitimité sur la lutte contre Israël et son statut de « résistance » se retrouve en porte-à-faux. Sa base aspire à davantage de normalité et à un État fonctionnel après des décennies de tensions et de conflits.
La chute de Bachar al-Assad redistribue les cartes et ouvre une nouvelle page. Le Hezbollah sera-t-il capable de s’adapter à cette nouvelle donne ? Parviendra-t-il à se réinventer en une force politique lambda dans un Liban pacifié et reconstructeur ? L’avenir du pays et de la région en dépend largement. Une chose est sûre : le statu quo ante a vécu.