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Liban : Hommage Émouvant à Nasrallah Défie l’État

À Beyrouth, des milliers de partisans du Hezbollah bravent l'interdit pour honorer Hassan Nasrallah. Une projection audacieuse sur un site emblématique attise les tensions. Que réserve la suite ?

Dans la pénombre d’une soirée de septembre, Beyrouth s’anime d’une ferveur à la fois solennelle et provocatrice. Des milliers de personnes convergent vers la corniche, brandissant des drapeaux jaunes et des portraits d’un homme dont le nom résonne encore dans les cœurs de ses partisans : Hassan Nasrallah. Un an après son assassinat par une frappe israélienne, le Liban reste marqué par cette figure emblématique, et la commémoration de sa mort, empreinte de défi, révèle les fractures profondes d’un pays en quête de stabilité.

Un Hommage Chargé de Symboles

Le 27 septembre 2024, jour du premier anniversaire de la mort de Hassan Nasrallah, les rues de Beyrouth vibrent d’une énergie particulière. La Grotte aux Pigeons, formation rocheuse iconique au large de la capitale, devient le théâtre d’un acte audacieux : une projection lumineuse du portrait de Nasrallah, accompagnée d’extraits de ses discours. Ce geste, bien que bref, marque les esprits. Il symbolise non seulement la mémoire d’un leader, mais aussi la résilience d’un mouvement, le Hezbollah, face à une pression croissante.

Des foules se rassemblent sur la corniche, certaines arrivant à bord de petits bateaux ornés de fanions jaunes, emblèmes du groupe. Parmi elles, des voix s’élèvent, scandant des slogans tels que « Israël est l’ennemi des musulmans ». Cet événement, loin d’être une simple cérémonie, est une déclaration d’allégeance et une réponse aux tensions qui secouent le pays.

Une Commémoration Controversée

Organiser un tel hommage n’a pas été sans heurts. Le Hezbollah, bien qu’ayant obtenu l’autorisation du gouverneur de Beyrouth pour tenir un rassemblement, a outrepassé les limites en projetant l’image de Nasrallah sur le rocher. Cette initiative a déclenché une polémique dans un Liban déjà divisé. Le Premier ministre, Nawaf Salam, a publiquement dénoncé cette violation, ordonnant l’arrestation des responsables de l’événement.

« Les organisateurs ont clairement violé l’accord donné par le gouverneur de Beyrouth. »

Nawaf Salam, Premier ministre libanais

Cette réaction officielle reflète les tensions entre le Hezbollah et un gouvernement soutenu par l’Occident, qui cherche à limiter l’influence du mouvement. La projection sur la Grotte aux Pigeons, bien qu’éphémère, a ravivé les débats sur le rôle du Hezbollah dans un pays où les divisions politiques et confessionnelles restent vives.

Le Contexte d’un Pays Fracturé

Le Liban traverse une période de fragilité extrême. Après une guerre dévastatrice avec Israël, conclue par un cessez-le-feu en novembre 2024, le Hezbollah, affaibli mais toujours influent, fait face à des pressions internes et externes. L’État libanais, soutenu par l’armée, a élaboré un plan pour désarmer le mouvement, en commençant par le sud du pays, frontalier d’Israël. Cette initiative, perçue comme une tentative de marginalisation, suscite l’opposition des partisans du Hezbollah.

Pour beaucoup, comme Abed Samhat, un livreur de 38 ans présent à la commémoration, cette lutte dépasse la simple politique. « Nous sommes combattus par tout le monde, mais l’État doit reconnaître la résistance », déclare-t-il. Ces mots traduisent un sentiment d’injustice partagé par les partisans du mouvement, qui se sentent exclus par un gouvernement qu’ils jugent déconnecté.

Le saviez-vous ? La Grotte aux Pigeons, ou Raouché, est un symbole de Beyrouth, prisé des habitants et des touristes. Sa transformation en toile pour un hommage politique souligne l’importance des lieux emblématiques dans les luttes idéologiques.

Les Voix de la Résistance

Parmi les participants, l’émotion est palpable. Samar Ammar, une avocate de 45 ans, exprime un attachement profond à la mémoire de Nasrallah : « Nous sommes venus renouveler notre allégeance. Les Libanais doivent s’unir contre un seul ennemi : Israël. » Ces mots reflètent une vision partagée par de nombreux partisans, pour qui le Hezbollah incarne une résistance face à une menace extérieure.

Les drapeaux jaunes du Hezbollah flottent dans la brise marine, tandis que des bateaux illuminés sillonnent les eaux près de la corniche. Cette mise en scène, soigneusement orchestrée, montre la capacité du mouvement à mobiliser ses soutiens, même dans un climat de tensions. Mais elle souligne aussi les défis auxquels il fait face, alors que le gouvernement cherche à imposer son autorité.

Un Conflit aux Racines Profondes

La commémoration s’inscrit dans un contexte plus large de relations tendues entre le Hezbollah et Israël. Depuis le début de la guerre à Gaza en octobre 2023, le mouvement a ouvert un front contre Israël en soutien à son allié, le Hamas. Ce conflit, qui a culminé en septembre 2024, a laissé des cicatrices profondes au Liban, avec des frappes israéliennes régulières visant des cibles du Hezbollah.

Le cessez-le-feu de novembre 2024 n’a pas mis fin aux hostilités. Des raids israéliens continuent de viser des positions du Hezbollah, alimentant un climat d’incertitude. Dans ce contexte, l’hommage à Nasrallah et à son successeur, Hachem Safieddine, tué en octobre 2024, prend une dimension stratégique, renforçant l’image de défi du mouvement.

Les Défis de l’Unité Nationale

Le Liban reste un pays profondément divisé. D’un côté, le Hezbollah et ses partisans prônent une résistance face à Israël, perçue comme une menace existentielle. De l’autre, le gouvernement, soutenu par des puissances occidentales, cherche à affirmer son autorité et à désarmer le mouvement. Cette fracture, exacerbée par la crise économique et les tensions confessionnelles, rend l’unité nationale difficile à atteindre.

Pourtant, les appels à l’unité résonnent. Comme le souligne Samar Ammar, l’idée d’un ennemi commun pourrait, en théorie, rassembler les Libanais. Mais dans la pratique, les divergences idéologiques et politiques continuent de creuser le fossé.

Événement Date Impact
Assassinat de Hassan Nasrallah 27 septembre 2024 Affaiblissement du Hezbollah, tensions accrues
Cessez-le-feu 27 novembre 2024 Fragile apaisement, raids israéliens persistants
Commémoration à Beyrouth Septembre 2025 Polémique et tensions avec le gouvernement

Un Avenir Incertain

La commémoration de l’assassinat de Nasrallah, bien plus qu’un simple hommage, est un acte politique. En défiant les autorités, le Hezbollah affirme sa présence et son influence, malgré les pressions pour le désarmer. Mais dans un pays où chaque geste est scruté, cet événement pourrait avoir des répercussions durables.

Le Liban, coincé entre ses divisions internes et les tensions régionales, se trouve à un carrefour. La mémoire de Nasrallah, projetée sur les rochers de Beyrouth, rappelle que les blessures du passé restent vives. Reste à savoir si cet hommage marquera un tournant ou s’il ne sera qu’un épisode de plus dans la saga complexe du pays.

Pour l’heure, les drapeaux jaunes continuent de flotter, et les voix des partisans résonnent. Mais dans l’ombre, les défis d’un Liban uni et apaisé semblent plus grands que jamais.

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