Vous en avez sûrement entendu parler : l’hydrothérapie du côlon, aussi appelée irrigation colonique, est la nouvelle tendance bien-être qui séduit de plus en plus. Ses adeptes vantent ses vertus “détoxifiantes” et ses bienfaits sur la santé. Mais derrière ces promesses alléchantes se cache une réalité bien plus sombre. Cette pratique, présentée comme anodine, relève en réalité de l’exercice illégal de la médecine et comporte de sérieux risques pour la santé. Décryptage.
L’hydrothérapie du côlon, kesako ?
Le principe est simple : il s’agit d’injecter de l’eau dans le côlon via le rectum afin de le “nettoyer en profondeur”. Les séances, facturées entre 70 et 140€, sont censées avoir de multiples vertus :
- Stimuler le système immunitaire
- Détoxifier l’organisme
- Soulager les troubles digestifs
- Améliorer la circulation sanguine
- Et même… nettoyer les angoisses !
Bref, une véritable cure de jouvence qui donnerait presque envie de s’y mettre. Sauf que…
Une pratique loin d’être sans danger
Contrairement à ce qu’affirment ses promoteurs, l’hydrothérapie du côlon comporte de sérieux risques pour la santé. Le docteur Claire Siret, présidente de la section santé publique de l’Ordre des médecins, met en garde contre les dangers, notamment infectieux ou de perforation du côlon.
Le risque est réel, contrairement aux bénéfices.
Dr Claire Siret
Les gastro-entérologues sont formels : aucune étude scientifique ne prouve l’efficacité de cette pratique. Pire, elle pourrait même être contre-productive en cas de réels problèmes de santé en retardant un véritable diagnostic.
Les praticiens dans l’illégalité
Si les cabinets proposant des séances d’hydrothérapie fleurissent un peu partout en France, la plupart des praticiens n’ont en réalité aucune compétence médicale. Ils sont souvent naturopathes, ostéopathes ou simples “praticiens en hydrothérapie”.
Or, la loi est claire : l’hydrothérapie du côlon est un acte médical, réservé aux médecins ou aux infirmiers sur prescription. La pratiquer sans diplôme expose donc à des poursuites pour exercice illégal de la médecine.
Du charlatanisme pur et simple
Pour le Dr Siret, pas de doute, il s’agit de “charlatanisme” :
C’est grotesque, ça n’a absolument aucune vertu thérapeutique. Faire croire aux gens qu’on va les guérir, c’est de l’abus de faiblesse.
Dr Claire Siret
Les dérives peuvent même aller plus loin, certains praticiens allant jusqu’à prétendre “nettoyer les angoisses” ou “conscientiser l’aspect émotionnel de l’intestin”. Un discours bien rodé pour appâter une clientèle en quête de bien-être, quitte à mettre leur santé en danger.
Un contrôle insuffisant des autorités
Malgré l’illégalité de la pratique, les contrôles restent rares. En 2013, une publicité mensongère avait été sanctionnée par l’ANSM. Mais 10 ans après, le praticien concerné continue d’exercer en toute impunité.
La Direction Générale de la Santé assure que les signalements sont pris au sérieux et peuvent donner lieu à des poursuites. Mais en attendant, les cabinets continuent de proliférer, profitant d’un certain flou juridique.
Vers une réglementation plus stricte ?
Face à l’ampleur du phénomène, des voix s’élèvent pour réclamer un encadrement plus strict. Pour l’avocat Philippe Courtois, spécialiste du droit médical, il est urgent de légiférer :
En plus d’exercice illégal de la médecine, ces personnes pourraient être poursuivies pour tromperie aggravée et publicité mensongère. Il est impératif de réglementer clairement cette pratique.
Maître Philippe Courtois
En attendant, la plus grande prudence est de mise. Si les promesses de l’hydrothérapie du côlon peuvent paraître séduisantes, mieux vaut s’en remettre à l’avis éclairé de son médecin. Car comme le rappelle le Dr Siret :
Ils surfent sur le retour au naturel et la défiance envers le monde médical. C’est dangereux.
Dr Claire Siret
Un constat alarmant qui devrait inciter chacun à la plus grande vigilance face à ces pratiques. Car en matière de santé, mieux vaut prévenir que guérir !