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L’Holocauste des Roms : Un génocide oublié longtemps ignoré

Le génocide des Roms pendant la Seconde Guerre mondiale est resté dans l'ombre pendant des décennies. Aujourd'hui, des chercheurs s'efforcent de documenter cette tragédie et de rendre hommage aux victimes. Découvrez l'histoire de Rosa Schneeberger, une des rares survivantes du plus grand camp rom du IIIe Reich...

Tatoué à même la peau, un numéro précédé d’un « Z » pour Zigeuner, « Tsigane » en allemand. Voilà la marque indélébile que portent encore certains survivants de l’Holocauste des Roms, un génocide longtemps occulté sur lequel les historiens tentent aujourd’hui de lever le voile.

Rescapée de l’enfer de Lackenbach

À 88 ans, Rosa Schneeberger fait partie des rares Sintis, communauté rom d’Europe occidentale, à être revenue des ténèbres. Déportée à l’âge de 5 ans avec sa mère et sa fratrie à Lackenbach, le plus grand camp rom du IIIe Reich en Autriche, elle y a connu la faim, le froid, les coups. Des images gravées au fer rouge dans sa mémoire d’enfant.

Je n’étais rassasiée que quand je volais la nourriture des chevaux. Ils étaient mieux nourris que nous.

– Rosa Schneeberger, survivante de l’Holocauste des Roms

Soumis au travail forcé, les détenus s’épuisaient à la tâche. Les plus faibles succombaient dans des conditions effroyables. Sur les 11 000 Roms et Sintis autrichiens, seuls 10% ont survécu. Beaucoup ont été envoyés vers les chambres à gaz d’Auschwitz.

La musique comme providence

Si Rosa a pu rentrer chez elle après la libération de Lackenbach par l’Armée rouge en mars 1945, c’est grâce au talent de musicien de son père qui divertissait les gardiens. Un sursis en forme de privilège dans cet univers de mort.

De grandes zones d’ombre

80 ans après la libération d’Auschwitz, l’ampleur de la persécution des Roms pendant la Seconde Guerre mondiale reste méconnue. Les historiens avancent prudemment le chiffre de 200 000 victimes, mais pour de nombreux pays, les données manquent.

Il n’existe pas de chiffres exacts sur le nombre de morts. C’est un génocide très mal documenté.

– Karola Fings, coordinatrice de la première encyclopédie sur le sujet

Les crimes commis n’ont pas été recensés sur le moment et des preuves ont été détruites. La recherche n’a vraiment progressé que depuis une vingtaine d’années, trop tard hélas pour recueillir la parole des rescapés.

Une reconnaissance tardive

Considérés comme une « race impure » dès 1935 par les lois de Nuremberg, les Roms ont pourtant été exclus du statut de victimes raciales après la guerre. Il faudra attendre les années 1980 et la mobilisation d’activistes pour que leur génocide commence à être reconnu.

  • Ce n’est qu’en 2015 que le 2 août devient la « Journée européenne de commémoration de l’Holocauste des Roms ».
  • En décembre 2022, l’IHRA publie enfin des recommandations pour enseigner cette histoire négligée.

Des avancées bien trop lentes pour les derniers témoins. En République tchèque, il aura fallu 20 ans pour qu’un mémorial soit érigé sur le site du camp de Lety, où plus de 300 Roms ont péri. Le dernier survivant s’est éteint avant de voir le projet aboutir.

Une identité enfouie

Pour échapper aux persécutions, de nombreuses familles roms ont renoncé après la guerre à transmettre leur culture et leurs traditions. Un déracinement douloureux vécu comme un secret honteux.

Si on savait que j’en suis une, les gens ne seraient plus aussi gentils avec moi.

– Christine Gaal, fille de déportés

Peur, silence, oubli… Autant d’obstacles qui expliquent les lacunes béantes dans l’historiographie de l’Holocauste des Roms. Un pan tragique de notre histoire qu’il est urgent de mettre en lumière avant qu’il ne sombre définitivement dans la nuit.

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