C’est un nouveau coup dur pour Rodrigo Rato. L’ancien directeur général du Fonds Monétaire International (FMI) et ex-ministre de l’Économie espagnol a été condamné ce vendredi par un tribunal de Madrid à quatre ans et neuf mois de prison ferme, ainsi qu’à une amende de plus de 2 millions d’euros. En cause : des délits fiscaux et de corruption liés à son patrimoine personnel.
Âgé de 73 ans, celui qui fut un temps considéré comme l’un des hommes les plus puissants de la finance mondiale n’en est pas à sa première condamnation. En 2017, il avait déjà écopé de quatre ans et demi de prison dans le cadre du scandale des cartes opaques de Caja Madrid, l’une des caisses d’épargne à l’origine de Bankia. Mais cette fois, c’est son patrimoine et sa situation fiscale personnelle qui sont dans le viseur de la justice.
Une chute vertigineuse
Pour Rodrigo Rato, la descente aux enfers semble sans fin. Propulsé à la tête du FMI en 2004 après avoir été ministre de l’Économie et des Finances dans le gouvernement de José María Aznar, cet ancien poids lourd du Parti Populaire (droite) a vu sa réputation et sa carrière réduites en miettes par les scandales à répétition.
En 2010, il prend les rênes de Bankia, née de la fusion de Caja Madrid avec six autres caisses régionales. Deux ans plus tard, la banque doit être sauvée in extremis par l’État espagnol, engloutissant au passage 22 milliards d’euros d’argent public. Un désastre qui lui vaudra une première condamnation pour avoir distribué des cartes opaques permettant aux dirigeants de s’offrir des dépenses somptuaires en toute discrétion.
Soupçons et révélations en cascade
Mais l’affaire des cartes « black » n’était que la partie émergée de l’iceberg. En 2015, Rodrigo Rato est mis en examen pour fraude fiscale, blanchiment d’argent et corruption. Son patrimoine et ses montages financiers complexes, y compris dans des paradis fiscaux, intriguent les enquêteurs. Des perquisitions permettent de mettre au jour de nombreuses irrégularités.
Les inspecteurs du fisc ont retrouvé des indices de fraude et de blanchiment à travers un réseau d’une quarantaine de sociétés, fondations et trusts.
D’après une source proche du dossier
Une partie de la fortune de l’ancien ministre aurait ainsi échappé au fisc espagnol pendant des années, entre comptes offshore, sociétés-écrans et autres structures opaques. Des révélations qui ne font qu’amplifier la colère de l’opinion publique, alors que l’Espagne peine à se remettre de la crise financière.
Justice rendue
Après des années d’enquête et de procédure, la sentence est finalement tombée. Jugé coupable de trois délits fiscaux, un délit de blanchiment et un délit de corruption, Rodrigo Rato devra purger une peine totale de quatre ans et neuf mois de prison. S’y ajoutent plus de deux millions d’euros d’amende, ainsi qu’une interdiction d’exercer toute fonction dans l’administration publique pendant 8 ans et 5 mois.
Un jugement sévère qui vient sanctionner les multiples dérives et abus de celui qui fut longtemps intouchable. De la gloire internationale à la disgrâce carcérale, la chute de Rodrigo Rato apparaît vertigineuse et sans appel. Un destin qui illustre à quel point opacité, corruption et optimisation fiscale agressive peuvent gangrener les plus hautes sphères du pouvoir et de la finance, avant d’exploser au grand jour.
Si ce nouveau scandale ébranle une fois de plus la classe politique espagnole, il envoie aussi un signal fort : même les puissants ne sont plus intouchables face à une justice et une opinion publique déterminées à faire la lumière sur les zones d’ombre et les abus commis en toute impunité pendant des années. Un sursaut de transparence et d’éthique qui ne peut qu’être salutaire pour restaurer la confiance dans les institutions.