Les pays européens ont beau avoir augmenté leurs dépenses de défense ces dernières années, l’Europe reste mal armée pour assurer sa propre sécurité face aux menaces extérieures. C’est ce que révèle un rapport publié vendredi par un important groupe de réflexion britannique, l’Institut international pour les études stratégiques (IISS). Un constat préoccupant alors que l’invasion russe de l’Ukraine a mis en lumière les faiblesses des capacités militaires européennes.
Des effectifs militaires encore insuffisants
Selon l’étude de l’IISS, les principales forces armées européennes souffrent toujours d’un manque d’effectifs. Malgré les efforts de recrutement, trop de pays continuent de voir leurs rangs s’amenuiser sans parvenir à attirer suffisamment les jeunes générations. Une situation qui fragilise la capacité de l’Europe à se défendre par elle-même.
Les experts soulignent également la dépendance persistante des Européens vis-à-vis des États-Unis dans tous les domaines militaires. Une dépendance qui interroge sur la pérennité du soutien américain, notamment depuis la réélection de Donald Trump à la Maison Blanche.
Une hausse des dépenses qui ne comble pas les lacunes
Certes, depuis l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014, les membres européens de l’Otan ont accru leurs dépenses de défense de 50%. Mais cela n’a pas suffi à combler les faiblesses structurelles héritées de la fin de la Guerre froide. L’arsenal européen a été sévèrement réduit et l’industrie de défense s’est contractée, limitant les capacités de production.
L’invasion de l’Ukraine en 2022 a cependant donné un coup d’accélérateur. Certains secteurs comme l’artillerie et la défense aérienne ont vu leur production exploser pour répondre aux besoins urgents du front. Le géant allemand Rheinmetall a par exemple décuplé sa fabrication annuelle d’obus de 155 mm.
Vers une Europe de la défense plus autonome ?
Face au défi russe, les dirigeants européens semblent déterminés à renforcer les capacités militaires du continent. La moitié des commandes des pays de l’Otan en Europe vont désormais à des entreprises européennes, contre un tiers auparavant. Un rééquilibrage en faveur d’une industrie de défense plus autonome.
Le nouveau commissaire européen chargé de la défense, Andrius Kubilius, a appelé l’UE à intensifier ses efforts, non pas en réaction à la réélection de Trump mais bien à cause de la menace que représente la Russie. Le président français Emmanuel Macron a lui aussi plaidé pour une Europe qui ne délègue plus éternellement sa sécurité à Washington.
L’indépendance stratégique européenne n’est plus une option, c’est une nécessité.
Un responsable européen de la défense
Mais le chemin sera long et semé d’embûches. Il faudra accroître massivement les budgets, reconstituer des stocks, moderniser les équipements, recruter et former de nouveaux soldats. Autant de défis colossaux qui nécessiteront une véritable volonté politique et des efforts soutenus sur le long terme. L’Europe devra aussi surmonter ses divergences internes et mieux coordonner les actions de ses États membres.
À l’heure où les menaces se multiplient, de la Russie à la Chine en passant par le terrorisme, l’Europe n’a d’autre choix que de se doter des moyens d’assurer elle-même sa sécurité et de défendre ses intérêts vitaux. C’est un impératif stratégique pour ne pas se retrouver à la merci des puissances étrangères dans un monde de plus en plus dangereux et imprévisible. La route est encore longue, mais les premiers jalons d’une véritable défense européenne semblent posés.