Alors que les tensions persistent entre le gouvernement taliban et les pays occidentaux, une série de petites victoires diplomatiques vient bousculer le statu quo. Depuis un mois, les portes des ambassades d’Afghanistan à Londres et à Oslo sont closes, à la demande expresse des autorités talibanes. Une décision qui ne passe pas auprès des diplomates de l’ancien régime, dénonçant une “trahison”.
Un imbroglio diplomatique de trois ans
Depuis la prise de pouvoir des talibans mi-août 2021, ces missions diplomatiques, dont le personnel avait été nommé par la République islamique d’Afghanistan, leur ennemi juré, avaient continué de fonctionner tant bien que mal. Pendant trois ans, elles ont dénoncé les agissements du nouveau régime, particulièrement envers les femmes afghanes, tout en poursuivant leurs activités consulaires.
Mais cet été, le gouvernement taliban a décidé de passer à l’offensive. Dans un courrier envoyé aux chancelleries occidentales, il a annoncé ne plus cautionner la délivrance de documents par ces ambassades, les accusant au passage d’une “énorme corruption” en raison de l’émission de “faux documents” et de l’augmentation des tarifs. Des allégations rejetées par plusieurs diplomates de l’ancien régime, mais reconnues en partie par une ancienne consule en poste en Europe.
Oslo et Londres cèdent, Berlin résiste
Face aux demandes insistantes des talibans, la plupart des pays occidentaux ont choisi de ne pas obtempérer. Mais la Norvège et le Royaume-Uni ont fait le choix inverse, donnant ainsi satisfaction au nouveau pouvoir afghan. Oslo a justifié sa décision en invoquant le droit international, estimant que ce sont les autorités de facto qui contrôlent l’appareil d’État en Afghanistan. Quant à Londres, deuxième plus gros contributeur de troupes lors de l’intervention de l’Otan en 2001, le Foreign Office a nié toute responsabilité, évoquant une décision de “l’État d’Afghanistan”.
Cette position pragmatique suscite l’incompréhension et la colère des diplomates de l’ancien régime. “Le mot qu’on peut employer, c’est +trahison+”, s’insurge Nazifullah Salarzai, président du Conseil des ambassadeurs afghans. Du côté de l’Allemagne, où vivent plus de 500 000 Afghans, on craint de voir Berlin emboîter le pas. Mais pour l’heure, le gouvernement allemand maintient le statu quo, ne considérant pas le régime taliban comme “légitime”.
La question migratoire au cœur des négociations
Au-delà des considérations de principe, les enjeux migratoires pèsent lourd dans la balance. Selon plusieurs sources, l’Allemagne aurait négocié avec les talibans, via le Qatar, l’expulsion fin août de 28 criminels afghans. Un accord migratoire a également été signé mi-septembre avec l’Ouzbékistan, pays voisin de l’Afghanistan, ouvrant la voie à de futures expulsions. Cette approche transactionnelle semble se généraliser, alors que l’Ouzbékistan a récemment agréé un ambassadeur afghan nommé par le nouveau régime.
Les talibans, partenaires antiterroristes inattendus
La donne sécuritaire n’est pas en reste. Face à la menace de la branche afghane du groupe État islamique, contre laquelle les talibans sont en première ligne, ces derniers apparaissent comme des interlocuteurs incontournables dans la lutte antiterroriste. “Les pays occidentaux ont des relations de facto avec les talibans en tant qu’acteur sécuritaire”, observe un ancien cadre des services de renseignement afghans réfugié en Europe.
Entre pragmatisme et realpolitik, les chancelleries occidentales semblent progressivement s’accommoder du “principe de réalité” résumé ainsi par le chercheur Gilles Dorronsoro : “Quand on perd les guerres, on n’a plus que des mauvaises solutions”. Et d’ajouter : “il n’y a aucune alternative au régime taliban”. Un constat qui devrait se vérifier lors de la COP29 qui s’ouvre ce lundi en Azerbaïdjan, où une délégation talibane est attendue. Une première sur la scène internationale pour le régime de Kaboul.
Alors que les équilibres diplomatiques se recomposent, l’avenir des relations entre l’Occident et l’Afghanistan reste plus que jamais suspendu à ce fragile jeu d’influences et de concessions réciproques. Si les talibans engrangent quelques succès, le chemin vers une reconnaissance internationale pleine et entière s’annonce encore long et semé d’embûches. Car au-delà des considérations géopolitiques, la question des droits humains, et notamment du sort réservé aux Afghanes, demeure un obstacle majeur à toute normalisation. Un dilemme cornélien pour des chancelleries occidentales écartelées entre leurs valeurs affichées et la défense de leurs intérêts stratégiques.
Mais cet été, le gouvernement taliban a décidé de passer à l’offensive. Dans un courrier envoyé aux chancelleries occidentales, il a annoncé ne plus cautionner la délivrance de documents par ces ambassades, les accusant au passage d’une “énorme corruption” en raison de l’émission de “faux documents” et de l’augmentation des tarifs. Des allégations rejetées par plusieurs diplomates de l’ancien régime, mais reconnues en partie par une ancienne consule en poste en Europe.
Oslo et Londres cèdent, Berlin résiste
Face aux demandes insistantes des talibans, la plupart des pays occidentaux ont choisi de ne pas obtempérer. Mais la Norvège et le Royaume-Uni ont fait le choix inverse, donnant ainsi satisfaction au nouveau pouvoir afghan. Oslo a justifié sa décision en invoquant le droit international, estimant que ce sont les autorités de facto qui contrôlent l’appareil d’État en Afghanistan. Quant à Londres, deuxième plus gros contributeur de troupes lors de l’intervention de l’Otan en 2001, le Foreign Office a nié toute responsabilité, évoquant une décision de “l’État d’Afghanistan”.
Cette position pragmatique suscite l’incompréhension et la colère des diplomates de l’ancien régime. “Le mot qu’on peut employer, c’est +trahison+”, s’insurge Nazifullah Salarzai, président du Conseil des ambassadeurs afghans. Du côté de l’Allemagne, où vivent plus de 500 000 Afghans, on craint de voir Berlin emboîter le pas. Mais pour l’heure, le gouvernement allemand maintient le statu quo, ne considérant pas le régime taliban comme “légitime”.
La question migratoire au cœur des négociations
Au-delà des considérations de principe, les enjeux migratoires pèsent lourd dans la balance. Selon plusieurs sources, l’Allemagne aurait négocié avec les talibans, via le Qatar, l’expulsion fin août de 28 criminels afghans. Un accord migratoire a également été signé mi-septembre avec l’Ouzbékistan, pays voisin de l’Afghanistan, ouvrant la voie à de futures expulsions. Cette approche transactionnelle semble se généraliser, alors que l’Ouzbékistan a récemment agréé un ambassadeur afghan nommé par le nouveau régime.
Les talibans, partenaires antiterroristes inattendus
La donne sécuritaire n’est pas en reste. Face à la menace de la branche afghane du groupe État islamique, contre laquelle les talibans sont en première ligne, ces derniers apparaissent comme des interlocuteurs incontournables dans la lutte antiterroriste. “Les pays occidentaux ont des relations de facto avec les talibans en tant qu’acteur sécuritaire”, observe un ancien cadre des services de renseignement afghans réfugié en Europe.
Entre pragmatisme et realpolitik, les chancelleries occidentales semblent progressivement s’accommoder du “principe de réalité” résumé ainsi par le chercheur Gilles Dorronsoro : “Quand on perd les guerres, on n’a plus que des mauvaises solutions”. Et d’ajouter : “il n’y a aucune alternative au régime taliban”. Un constat qui devrait se vérifier lors de la COP29 qui s’ouvre ce lundi en Azerbaïdjan, où une délégation talibane est attendue. Une première sur la scène internationale pour le régime de Kaboul.
Alors que les équilibres diplomatiques se recomposent, l’avenir des relations entre l’Occident et l’Afghanistan reste plus que jamais suspendu à ce fragile jeu d’influences et de concessions réciproques. Si les talibans engrangent quelques succès, le chemin vers une reconnaissance internationale pleine et entière s’annonce encore long et semé d’embûches. Car au-delà des considérations géopolitiques, la question des droits humains, et notamment du sort réservé aux Afghanes, demeure un obstacle majeur à toute normalisation. Un dilemme cornélien pour des chancelleries occidentales écartelées entre leurs valeurs affichées et la défense de leurs intérêts stratégiques.