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Les Républicains veulent restreindre le droit du sol à Mayotte

Le groupe LR à l'Assemblée s'apprête à déposer une proposition de loi polémique visant à restreindre drastiquement le droit du sol à Mayotte. Cette mesure suffira-t-elle à endiguer l'immigration illégale sur l'île ?

Alors que le Rassemblement National multiplie les déplacements à Mayotte pour dénoncer l’immigration illégale, le parti Les Républicains compte bien ne pas laisser ce terrain à son rival. Selon des informations obtenues par notre rédaction, le groupe LR à l’Assemblée nationale s’apprête en effet à déposer une proposition de loi visant à limiter drastiquement le droit du sol dans ce département d’outre-mer confronté à une forte pression migratoire.

Vers un durcissement des conditions d’accès à la nationalité française

Actuellement, la loi prévoit qu’un enfant né à Mayotte devient automatiquement français si l’un de ses parents y réside régulièrement depuis plus de trois mois au moment de la naissance. Les députés LR veulent faire passer ce délai à un an minimum de résidence ininterrompue pour les deux parents.

Cette mesure, si elle était adoptée, marquerait un net durcissement des conditions d’attribution de la nationalité sur le territoire mahorais. Elle s’inscrit dans la droite ligne des propositions portées par la droite sur les questions migratoires.

Il est urgent de restaurer un équilibre et de mieux contrôler les flux migratoires à Mayotte, en alignant la législation sur les réalités démographiques et sociales de l’île.

Extrait de l’exposé des motifs de la proposition de loi LR

Une réponse à l’activisme du RN sur le sujet

Pour Les Républicains, il s’agit clairement de ne pas laisser Marine Le Pen occuper seule le terrain sur la question ultra-sensible de l’immigration à Mayotte. La présidente du Rassemblement National vient d’achever une visite très médiatisée sur l’île, un mois après le passage dévastateur du cyclone Cheneso.

En déposant ce texte dans le cadre de leur niche parlementaire du 6 février, les députés de droite espèrent démontrer leur fermeté sur le dossier migratoire. Un calcul politique assumé à un an des élections européennes, scrutin sur lequel la thématique de l’immigration devrait peser lourd.

Le gouvernement va-t-il suivre ?

Reste à savoir quelle sera la réaction de l’exécutif face à cette offensive de la droite. Il y a un an, Gérald Darmanin, alors ministre de l’Intérieur, avait exprimé son souhait de supprimer purement et simplement le droit du sol à Mayotte. Une déclaration choc qui avait suscité de vives réactions, y compris dans la majorité.

Son successeur Place Beauvau, Bruno Retailleau, est lui-même issu des rangs LR. Mais soutiendra-t-il pour autant la démarche de son ancien groupe parlementaire ? Rien n’est moins sûr, tant la question est explosive sur les plans politique et juridique.

Le ministre de l’Intérieur est bien évidemment au courant de notre initiative. À lui de prendre ses responsabilités.

Philippe Gosselin, député LR

Un sujet périlleux sur le plan constitutionnel

Car si les députés LR assurent que leur proposition est juridiquement solide, plusieurs observateurs soulèvent déjà des doutes quant à sa constitutionnalité. Instaurer des règles d’accès à la nationalité différentes d’un territoire à l’autre de la République pourrait en effet se heurter au principe d’égalité devant la loi.

Les Sages du Conseil constitutionnel pourraient donc être amenés à se prononcer si le texte était adopté en l’état. Un écueil de taille, qui avait déjà refroidi l’élan de Gérald Darmanin l’an dernier.

Une proposition suffisante pour endiguer l’immigration illégale ?

Au-delà des questions de droit, c’est l’efficacité même de la mesure qui interroge. Beaucoup doutent qu’une simple modification des règles d’attribution de la nationalité suffise à tarir les flux migratoires vers Mayotte, qui connait une situation sociale et sécuritaire explosive.

D’autres leviers sont régulièrement évoqués par les acteurs locaux, comme le renforcement des contrôles aux frontières, la lutte contre les filières de passeurs ou encore la coopération avec les Comores, principale source de l’immigration clandestine sur l’île.

Autant de chantiers immenses, sur lesquels la proposition de loi des Républicains n’apporte pas de réponse. Mais dans ce dossier hautement inflammable, c’est aussi sur le terrain symbolique et politique que la bataille se joue. En la matière, cette initiative a le mérite de poser clairement les termes du débat.

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