Présenté comme l’avenir de l’énergie nucléaire civile, le réacteur EPR devait offrir une puissance accrue et une sécurité renforcée. Pourtant, de la Finlande à la Chine en passant par la France, les chantiers de cette technologie principalement française ont accumulé les retards et les surcoûts. Retour sur les grandes étapes d’un parcours semé d’embûches.
La genèse de l’EPR en France
L’histoire de l’EPR démarre en 1992, fruit d’une collaboration entre le français Framatome (futur Areva) et l’allemand Siemens. En 2004, le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin donne son feu vert pour le développement de cette nouvelle génération de réacteurs. Le site de Flamanville, dans la Manche, est choisi pour accueillir le premier EPR français. Les travaux y débutent en décembre 2007.
Un contrat finlandais prometteur
Dès 2003, le consortium Areva-Siemens décroche un contrat de 3 milliards d’euros pour la construction d’un EPR sur le site d’Olkiluoto en Finlande. Les travaux commencent deux ans plus tard, en septembre 2005. C’est le début d’une longue série de chantiers à l’international pour cette technologie française.
L’EPR s’exporte en Chine
En novembre 2007, lors d’une visite du président Nicolas Sarkozy en Chine, Areva signe un accord de 8 milliards d’euros pour la construction de deux EPR à Taishan, dans le sud du pays. Les travaux y démarrent en 2009. Malgré ces succès à l’export, des nuages s’amoncellent à l’horizon pour la filière EPR.
Fukushima, le coup d’arrêt
La catastrophe nucléaire de Fukushima en mars 2011 provoque une vague de rejet du nucléaire dans le monde, notamment en Allemagne qui décide de sortir de l’atome. Siemens se retire du projet EPR, laissant Areva seul aux commandes. L’accident japonais entraîne aussi des reports et des gels de projets EPR au Royaume-Uni et en Inde.
Défauts en série et dérapages budgétaires
En 2015, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) révèle une anomalie « sérieuse » dans l’acier de la cuve du réacteur de Flamanville, tandis qu’EDF signale des défauts de soudures. Ces problèmes, parmi d’autres, vont entraîner d’importants surcoûts. La facture de l’EPR français devrait finalement dépasser les 13 milliards d’euros, soit 4 fois le budget initial, pour une mise en service attendue avec 12 ans de retard.
Démarrages laborieux en Chine et en Finlande
Les premiers EPR à entrer en service sont ceux de Taishan en Chine, en 2018 et 2019. Mais ils connaissent rapidement des problèmes, nécessitant des arrêts prolongés en 2021 et 2023. En Finlande, l’EPR d’Olkiluoto démarre finalement en décembre 2021 avec 12 ans de retard, sur fond de conflit entre TVO et Areva concernant les responsabilités sur ce fiasco.
Un avenir français encore incertain
Malgré ces déboires, la France mise toujours sur l’EPR. En février 2022, le président Emmanuel Macron annonce son intention de construire six nouveaux réacteurs EPR2, une version optimisée, dans l’hexagone. Concernant l’EPR de Flamanville, après de multiples reports, son raccordement au réseau est désormais prévu le 20 décembre 2024. Un aboutissement attendu de longue date pour cette technologie qui aura connu un parcours des plus chaotiques.