Nantes, cité des Ducs, semble traverser sa pire crise économique depuis plus de 15 ans. Selon des sources proches du tribunal de commerce, pas moins de 589 liquidations judiciaires ont été enregistrées en 2024, frôlant ainsi le triste record de 600 faillites atteint lors de la crise financière de 2008. Un constat alarmant qui soulève de nombreuses questions sur l’avenir du tissu économique local.
Le centre-ville particulièrement touché par les fermetures
En se promenant dans les rues du cœur de Nantes, impossible de passer à côté des nombreuses vitrines condamnées et des locaux commerciaux vacants. D’après nos informations, le taux de cellules vides aurait même doublé en l’espace de trois ans, passant de 3% en 2021 à 6% aujourd’hui. Une situation préoccupante qui n’épargne ni les petits commerces indépendants, ni les grandes enseignes.
Pour le président d’une association de commerçants du centre-ville, qui a souhaité garder l’anonymat, cette accumulation de fermetures crée un véritable « effet domino » : « Lorsqu’il existe une concentration de commerces fermés au même endroit, il devient très difficile d’y relancer rapidement une activité. Cela décourage les repreneurs potentiels et aggrave le sentiment de désertification. »
Des indicateurs au rouge
Au-delà de l’aspect visuel désolant, plusieurs signaux confirment la gravité de la crise traversée par l’économie nantaise :
- Le nombre de dossiers de faillite examinés lors des audiences du tribunal de commerce a explosé, passant d’une quinzaine à près de 25 en moyenne. Du jamais vu depuis 2008.
- Les injonctions de payer, qui reflètent les difficultés de trésorerie des entreprises, ont bondi de 27% sur un an selon le vice-procureur.
- Les créations d’entreprises et le volume d’investissements marquent le pas, signe d’une perte de confiance des entrepreneurs.
Si la hausse des défaillances touche la France entière, elle semble particulièrement marquée dans la cité des Ducs. Un constat inquiétant qui appelle une réaction forte des pouvoirs publics.
L’immobilier et les manifestations pointés du doigt
Interrogés sur les causes de ce marasme, les juges consulaires mettent en avant deux facteurs aggravants propres au contexte nantais :
Tout d’abord, la crise immobilière qui frappe durement la région. Entre la fin de l’accès au crédit pour les passoires thermiques, la hausse de la taxe foncière et les menaces d’encadrement des loyers, le secteur du BTP est sinistré. Pas moins d’un tiers des faillites concernent ainsi des entreprises liées à l’immobilier (promoteurs, artisans, architectes…).
Autre élément perturbateur souligné par les magistrats : la multiplication des manifestations, souvent émaillées de violences, dans le centre-ville. Des mouvements sociaux récurrents en 2024, année électorale, qui auraient fortement pénalisé l’activité des commerces selon de nombreux témoignages. « À chaque manif, on est pris en otage par les black blocs qui cassent tout. Les clients désertent et l’État ne fait rien », déplore un commerçant excédé.
Vers des mesures de soutien à l’économie locale ?
Face à l’ampleur de la crise, les regards se tournent désormais vers les pouvoirs publics. Que compte faire la mairie pour enrayer l’hémorragie des faillites et redynamiser le commerce en centre-ville ?
Contacté par nos soins, l’adjoint au maire en charge de l’économie assure que « la ville met tout en œuvre pour sécuriser les parcours des manifestations ». Pas sûr que cela suffise à rassurer des commerçants à bout, qui attendent des mesures concrètes de soutien.
Du côté de la Chambre de Commerce et d’Industrie, on plaide pour un vaste plan de relance en faveur des TPE-PME, avec des aides ciblées pour les entreprises en difficulté, un allègement des charges et un accompagnement renforcé des créateurs. Des propositions qui devraient être soumises prochainement aux élus locaux.
Une chose est sûre : sans réaction rapide et massive, le tissu économique nantais pourrait mettre des années à se relever de ce coup dur. Le nombre record de faillites en 2024 doit servir d’électrochoc pour prévenir un désastre social et humain. L’avenir de milliers d’emplois et de savoir-faire en dépend.