L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis suscite une vive inquiétude parmi les étudiants étrangers sur les campus américains. Redoutant un durcissement immédiat des conditions d’entrée sur le territoire pour les ressortissants étrangers, plusieurs grandes universités exhortent déjà leurs élèves internationaux actuellement en vacances dans leur pays d’origine à revenir rapidement, avant l’investiture prévue le 20 janvier prochain.
Avec plus d’un million d’étudiants internationaux accueillis en 2023-2024, les États-Unis sont la première destination mondiale pour les études supérieures. Une manne financière considérable, mais aussi un formidable vivier de talents pour l’économie et la recherche américaine. Un statut que pourrait menacer le retour au pouvoir d’un président ouvertement hostile à l’immigration.
L’ombre du « Muslim Ban » plane à nouveau
Lors de son premier mandat, le milliardaire républicain avait marqué les esprits en imposant dès janvier 2017 un gel des arrivées de ressortissants de plusieurs pays à majorité musulmane, une mesure très controversée baptisée « Muslim Ban » par ses détracteurs. Environ 17 000 étudiants avaient été directement impactés.
Si ces restrictions avaient finalement été levées par son successeur Joe Biden, Donald Trump a d’ores et déjà annoncé vouloir les rétablir et même les étendre. Ses conseillers ont ainsi évoqué l’éventualité de viser spécifiquement les étudiants originaires de pays jugés hostiles aux États-Unis, en réponse notamment à la multiplication de manifestations pro-palestiniennes sur les campus.
Harvard, MIT, Cornell… Les universités se mobilisent
Face aux menaces, les grandes universités américaines se mobilisent pour protéger leurs précieux étudiants étrangers. « Une interdiction de voyager devrait entrer en vigueur peu après l’investiture de Donald Trump », met ainsi en garde Cornell sur son site, appelant tous les élèves internationaux à rentrer pour la rentrée de janvier.
Selon des médias américains, le MIT, Harvard ou encore l’University of Southern California (USC) auraient adressé des messages similaires, exhortant les étudiants concernés à revenir sur le territoire américain avant le 20 janvier. Une position que ne partagent cependant pas tous les établissements à ce stade, certains jugeant ces alertes prématurées tant qu’aucune annonce officielle n’a été faite.
Les étudiants indiens et chinois particulièrement inquiets
D’après les statistiques de l’Institute of International Education (IIE), les étudiants indiens et chinois représentent à eux seuls plus de la moitié des effectifs internationaux sur les campus américains. Deux communautés particulièrement inquiètes des intentions de la future administration Trump.
Si le « Muslim Ban » ne les visait pas directement, beaucoup redoutent que les procédures d’obtention de visa ne se durcissent à leur encontre également. Une crainte renforcée par les tensions diplomatiques et commerciales entre Washington et Beijing, sur fond de rivalité technologique et géopolitique.
« C’est une période d’incertitude pour nous tous. Personne ne peut prédire quelles seront les décisions de la prochaine administration. Mais avec tout ce qui s’est passé ces dernières années entre les États-Unis et la Chine, on est très inquiets. »
– Témoignage d’un étudiant chinois à Columbia University
Un pilier de l’enseignement supérieur en danger
Au-delà de la situation personnelle des étudiants concernés, c’est tout un pan de l’enseignement supérieur américain qui pourrait vaciller si ces derniers désertaient en masse les campus. Une catastrophe économique pour des universités déjà fragilisées par la crise du Covid et très dépendantes des frais d’inscription élevés payés par cette population.
Mais l’impact serait aussi scientifique, culturel et diplomatique. Les étudiants étrangers constituent en effet un formidable vivier de talents et de main d’œuvre qualifiée pour les entreprises et laboratoires américains. Leur présence favorise aussi grandement les échanges académiques ainsi que la diffusion du « soft power » des États-Unis à travers le monde.
Si cette attractivité venait à s’éroder sous l’effet d’un climat hostile aux étrangers, les conséquences pourraient s’avérer très dommageables pour le rayonnement du pays. Un risque dont les grandes universités tentent de convaincre l’administration Trump, tout en s’efforçant de rassurer au mieux leurs étudiants internationaux dans cette période d’incertitude.