Un nouveau front vient de s’ouvrir dans les relations déjà tendues entre les États-Unis et le Mexique. Washington a annoncé son intention de qualifier huit puissants cartels de la drogue latino-américains, dont le célèbre cartel de Sinaloa, de groupes « terroristes ». Une mesure explosive qui suscite l’ire de Mexico.
Selon le journal officiel américain, cette liste noire du narcotrafic comprendra également le tristement fameux gang salvadorien MS-13, le cartel mexicain de Jalisco Nueva Generacion, la Nueva Familia Michoacana, ainsi que le gang vénézuélien Tren de Aragua. D’après un document signé par le secrétaire d’État Marco Rubio, ces organisations « menacent la sécurité nationale, la politique étrangère ou l’économie des États-Unis ».
Le Mexique dénonce une ingérence et contre-attaque
Sans surprise, le gouvernement mexicain s’oppose fermement à cette initiative, y voyant la porte ouverte à des ingérences américaines sur son territoire. La présidente de Mexico, Claudia Sheinbaum, a rapidement riposté en menaçant d’élargir la plainte déposée par son pays contre des fabricants d’armes américains.
Selon elle, si les cartels venaient effectivement à être désignés comme terroristes, leurs fournisseurs d’armes pourraient être accusés de complicité. Et les États-Unis sont clairement dans le viseur. « Comme l’a déjà reconnu le propre département de la Justice des États-Unis, 74% des armes des groupes criminels proviennent du Texas, d’Arizona ou d’autres États américains », a martelé la dirigeante de gauche.
Trump accuse, le Mexique dément
Cette escalade intervient alors que les relations entre les deux voisins étaient déjà au plus bas. Le président américain Donald Trump avait récemment accusé, sans preuve, le gouvernement mexicain d’avoir des liens avec le crime organisé. Des allégations balayées comme des « calomnies » par Claudia Sheinbaum.
Si les groupes de la criminalité organisée étaient déclarés terroristes, nous devrions élargir la plainte aux États-Unis.
Claudia Sheinbaum, présidente de Mexico
Fentanyl et immigration au cœur des tensions
Au-delà de ces passes d’armes verbales, Washington reproche surtout à Mexico de ne pas en faire assez pour endiguer le trafic de fentanyl et l’immigration clandestine. Donald Trump est même allé jusqu’à menacer d’imposer des droits de douane de 25% sur les produits canadiens et mexicains.
Face à cette pression, le Mexique a dû s’engager à déployer 10 000 soldats supplémentaires à sa frontière nord. Mais cela n’a fait que repousser d’un mois l’épée de Damoclès des sanctions douanières.
Une escalade aux conséquences imprévisibles
En qualifiant les cartels de terroristes, les États-Unis franchissent indéniablement un nouveau cap. Cette mesure pourrait justifier des actions plus musclées, y compris sur le sol mexicain. Avec le risque d’attiser encore les tensions et de déstabiliser un peu plus la région.
Mais elle traduit aussi l’impuissance de Washington face aux flots de drogue et de migrants à sa frontière sud. Une preuve de plus, s’il en fallait, de la complexité de la lutte contre ces fléaux qui rongent les deux pays. Et un aveu d’échec pour la guerre antidrogue menée depuis des décennies.
Reste à voir jusqu’où ira cette escalade. Le Mexique semble déterminé à ne pas se laisser faire, quitte à ouvrir un nouveau front judiciaire contre les fabricants d’armes américains. Un bras de fer qui s’annonce long et périlleux, avec de lourds enjeux sécuritaires, diplomatiques et économiques. L’issue de ce duel aura un impact décisif sur l’avenir de la région et les relations entre les deux poids lourds du continent.
