Dans un changement de posture stratégique majeur, les États-Unis viennent de donner leur feu vert à l’Ukraine pour utiliser des missiles à longue portée fournis par Washington afin de frapper le territoire russe. Cette décision intervient à quelques semaines seulement de l’investiture de Donald Trump, connu pour ses critiques sur l’aide américaine apportée à Kiev.
Selon un haut responsable américain s’exprimant sous couvert d’anonymat, le président Joe Biden a ainsi accédé à une demande de longue date de l’Ukraine. Kiev réclamait en effet depuis plusieurs mois l’autorisation d’employer les missiles Storm Shadow britanniques et les ATACMS américains contre des cibles situées plus en profondeur dans le territoire russe.
D’une portée de plusieurs centaines de kilomètres, ces armes offriraient à l’armée ukrainienne la capacité de viser des sites logistiques et des aérodromes russes cruciaux. Mais jusqu’à présent, les États-Unis comme d’autres alliés refusaient de franchir ce pas, par crainte d’une escalade avec Moscou. Le président russe Vladimir Poutine avait averti qu’une telle décision signifierait que « les pays de l’OTAN sont en guerre contre la Russie ».
Une réponse au déploiement de soldats nord-coréens
Selon le New York Times citant des sources proches du dossier, la décision américaine serait motivée par l’envoi récent de militaires nord-coréens en soutien des forces russes dans la région frontalière de Koursk. C’est donc initialement dans ce secteur que les missiles ATACMS devraient être déployés.
Cette annonce de Washington survient d’ailleurs le jour même d’une des plus intenses salves de frappes russes depuis plusieurs mois contre l’Ukraine. Selon les autorités ukrainiennes, ces bombardements auraient fait au moins 10 morts et une vingtaine de blessés à travers le pays.
L’Ukraine craint un affaiblissement du soutien américain
Durant sa campagne, le président élu Donald Trump n’a pas ménagé ses critiques envers les dizaines de milliards de dollars d’aide débloqués pour l’Ukraine. Promettant de régler le conflit « en 24 heures » sans plus de précisions, son retour à la Maison Blanche le 20 janvier prochain inquiète Kiev.
Confrontées à des difficultés sur le front, les forces ukrainiennes redoutent en effet un essoufflement du soutien américain, voire l’imposition d’un accord impliquant des concessions territoriales à la Russie. Dans ce contexte, l’administration Biden s’efforce d’accélérer les livraisons d’équipements militaires et de mettre en place des mécanismes pour que les Européens prennent le relais.
Une coordination de l’aide confiée à l’OTAN
Ainsi, la coordination de l’assistance militaire à l’Ukraine, jusqu’ici assurée par les seuls Américains, a été transférée à l’OTAN. Selon le Pentagone, sur l’enveloppe votée au printemps par le Congrès, il resterait encore environ 9,2 milliards de dollars à attribuer, dont :
- 7,1 milliards à puiser dans les stocks d’armements américains
- 2,1 milliards pour financer des contrats d’achat d’armes
Donner à l’Ukraine les moyens de frapper la Russie en profondeur avec des missiles longue portée marque donc un tournant stratégique majeur de la part des États-Unis. Une décision lourde de conséquences potentielles sur la dynamique du conflit, alors que plane l’incertitude liée à l’arrivée au pouvoir de Donald Trump. L’évolution de la position américaine dans les prochains mois sera scrutée de près, tant à Kiev qu’à Moscou.
