Les concerts de musique classique, temples de l’élégance et du raffinement, semblent désormais faire face à une vague de décontraction vestimentaire qui en laisse plus d’un perplexe. Finis les smokings et les robes du soir, place aux jeans et aux tenues débraillées. Une tendance qui choque et qui interroge sur l’évolution des codes de l’étiquette dans ce milieu souvent perçu comme un bastion du traditionalisme.
Le choc des cultures vestimentaires
Le contraste est saisissant. D’un côté, les salles de concert majestueuses aux ors et velours chatoyants. De l’autre, un public de plus en plus décontracté, pour ne pas dire négligé. T-shirts, jeans troués, baskets… La tenue de ville semble avoir pris le pas sur la tenue de soirée. Un phénomène qui ne se cantonne pas au public mais qui gagne aussi la scène, où certains musiciens n’hésitent plus à troquer le frac pour des tenues plus casual.
On est bien loin du temps de Bernard Gavoty.
– Un mélomane choqué
L’exemple frappant de la Maison de la Radio
La Maison de la Radio, haut lieu de la musique classique, n’échappe pas à cette tendance. Lors d’un récent enregistrement d’une intégrale de Sibelius par le chef Mikko Franck, la décontraction était de mise. Public en jean, buvette en mode “Fête de l’Huma”, et même un intervenant en mocassins et pull sur scène. Une ambiance bien éloignée de la solennité habituelle de ce type d’événement.
Quand les artistes transgressent les codes
Si le public se laisse aller à un certain relâchement vestimentaire, certains artistes ne sont pas en reste. La chemise débraillée dépassant du pull semble devenir un must pour les solistes et chefs branchés. Quant aux orchestres, les éternels costumes noirs laissent parfois place à des tenues plus originales mais pas toujours du meilleur goût. Une volonté de modernité ou un manque de respect envers la musique ?
L’impact sur la perception de la musique
Au-delà de la simple question du style, c’est l’impact de ces tenues décontractées sur la perception de la musique qui interroge. La solennité d’un concert classique ne se nourrit-elle pas aussi de l’élégance de sa mise en scène, tant sur scène que dans la salle ? Le laisser-aller vestimentaire ne risque-t-il pas de “banaliser” ce moment particulier qu’est le concert, en gommant son caractère exceptionnel ?
Modernité vs tradition : quel équilibre ?
Bien sûr, la musique classique se doit aussi de vivre avec son temps et de s’ouvrir à de nouveaux publics. Un assouplissement des codes de l’étiquette peut sembler nécessaire pour éviter l’écueil de l’élitisme. Mais jusqu’où peut aller cette décontraction sans dénaturer l’essence même du concert classique ? C’est tout l’enjeu du difficile équilibre à trouver entre tradition et modernité dans ce milieu.
En attendant, les puristes continueront de boutonner leurs smokings et de brosser leurs robes longues, non sans une certaine nostalgie. Quant aux adeptes du décontracté, gageons qu’ils sauront malgré tout garder une certaine tenue. Car comme le disait si bien le regretté chef d’orchestre Carlo Maria Giulini, « L’habit ne fait pas le moine, mais il y contribue beaucoup ».