Face à la montée de l’abstention, de la défiance envers les élites et des populismes, les démocraties occidentales sont en quête d’un sursaut salvateur. C’est dans ce contexte que s’est tenue la 6ème édition des Conversations Tocqueville, les 5 et 6 juillet derniers, au château de l’illustre philosophe dans la Manche. Réunissant une vingtaine d’intellectuels et responsables politiques de premier plan, venus de France et de l’étranger, cet événement a été l’occasion de débattre des maux qui rongent nos systèmes démocratiques et d’esquisser des pistes de renouveau.
Un constat alarmant sur l’état de la démocratie
D’entrée de jeu, les intervenants ont dressé un tableau préoccupant de la situation. Le premier tour des élections législatives en France, marqué par une abstention record de près de 53%, en a été une illustration frappante. Comme l’a souligné Édouard Philippe, figure de proue de la majorité présidentielle, ce scrutin a envoyé un message clair aux responsables politiques : “Réveillez-vous !”.
Au-delà de l’Hexagone, c’est l’ensemble des démocraties occidentales qui semblent traverser une crise existentielle. Perte de repères face à la mondialisation, montée des inégalités, discrédit des élites, poussée des extrêmes… Les symptômes sont multiples et profonds. Pour de nombreux citoyens, l’idéal démocratique apparaît de plus en plus comme une coquille vide.
Les hommes se laissent posséder par un lâche amour des jouissances présentes.
– Alexis de Tocqueville
Redonner du sens au projet démocratique
Face à ce constat alarmant, les participants aux Conversations Tocqueville ont insisté sur l’urgence de redonner du souffle et du sens au projet démocratique. Cela passe notamment par une meilleure prise en compte des aspirations citoyennes, trop souvent ignorées par des élites déconnectées des réalités. Il s’agit aussi de revivifier certaines valeurs fondatrices comme l’égalité des chances, la méritocratie, la laïcité ou encore l’idéal républicain.
Parmi les pistes évoquées :
- Renforcer la participation citoyenne via des dispositifs innovants (conventions citoyennes, référendums d’initiative populaire, etc.)
- Lutter plus efficacement contre les inégalités sociales et territoriales qui minent la cohésion nationale
- Restaurer la confiance dans les institutions et les corps intermédiaires (partis, syndicats, associations)
- Défendre avec vigueur les principes démocratiques face aux menaces internes et externes (populisme, ingérences étrangères…)
Pour un “patriotisme démocratique”
Au-delà de ces mesures concrètes, les Conversations Tocqueville ont aussi été l’occasion de réfléchir à une refondation intellectuelle de l’idéal démocratique. Certains intervenants ont ainsi plaidé pour un “patriotisme démocratique”, visant à réconcilier l’attachement à la nation et l’aspiration à l’universel. D’autres ont insisté sur la nécessité de promouvoir une “écologie démocratique”, articulant transition environnementale et approfondissement de la démocratie.
S’il n’y a pas de recette miracle, une chose est sûre : les démocraties occidentales ne pourront surmonter la crise qu’elles traversent sans un sursaut collectif et un profond aggiornamento. Les Conversations Tocqueville auront eu le mérite d’ouvrir des pistes et de susciter un débat aussi urgent que nécessaire. À nous, citoyens, intellectuels et décideurs, de nous en saisir pour bâtir la démocratie de demain.
