C’est un joyau du patrimoine lyonnais qui se fait désirer. Fermé depuis plusieurs années, le musée des Tissus de Lyon accumule les retards dans son ambitieux projet de rénovation, laissant les amateurs d’art et d’histoire dans l’expectative quant à sa date de réouverture.
Un renouveau sous l’égide de la Région
Tout avait pourtant bien commencé. En 2017, la région Auvergne-Rhône-Alpes, menée par Laurent Wauquiez, avait récupéré la gestion de ce lieu prestigieux pour un euro symbolique. Un accord providentiel conclu avec la CCI de Lyon, propriétaire historique du musée à bout de souffle financièrement.
Un projet d’envergure, à la hauteur des collections textiles du lieu, considérées comme les plus importantes au monde.
– D’après une source proche du dossier
Deux ans plus tard, les plans de la renaissance étaient dévoilés : l’architecte de renom Rudy Ricciotti, auréolé de son travail sur le Mucem à Marseille, était choisi pour redonner vie à cette institution culturelle. De quoi faire saliver les Lyonnais et la presse locale.
Première pierre d’achoppement
Pourtant, très vite, le projet se heurte à une levée de boucliers des riverains. Les esquisses audacieuses de l’architecte star ne font pas l’unanimité. Face à la fronde, la Région est contrainte de revoir sa copie et Rudy Ricciotti de redessiner ses plans. Un retour à la case départ qui fait prendre du retard au projet.
Une nouvelle version, amputée de plusieurs bâtiments et structures, est finalement présentée en 2023. Des négociations avec les riverains ont permis de trouver un compromis, assure-t-on du côté du conseil régional. Mais le mal est fait : le calendrier initial qui prévoyait une réouverture partielle dès 2026 paraît intenable.
Le permis de construire se fait attendre
Car un autre grain de sable est entre-temps venu enrayer la machine : le permis de construire n’a toujours pas été déposé. Un retard que la Région impute à la nécessité de finaliser tous les détails avec les riverains avant de soumettre le dossier.
Résultat, alors que les travaux de démolition étaient programmés en octobre 2025, “afin de ne pas risquer de laisser une friche en cœur de ville et de permettre aux commerçants de bénéficier pleinement de la saison estivale“, dixit le conseil régional, rien n’est moins sûr aujourd’hui.
Le document relatif à l’opération portée par l’agence Ricciotti est prévu pour la fin d’année 2024.
– Communiqué de la Région
Réouverture partielle en 2028 ?
Une date qui laisse perplexe quant à une possible réouverture, même partielle, en 2028 comme on l’espérait. Car sans permis en poche, impossible d’afficher un calendrier définitif pour ce projet d’architecture muséale qui doit redonner son lustre à un fleuron du patrimoine lyonnais.
D’autant que le tempo politique n’est pas à négliger. Laurent Wauquiez, grand artisan de cette renaissance, aura-t-il toujours les mains sur le volant une fois le permis accordé ? Rien n’est moins sûr à l’approche des échéances électorales. De quoi laisser planer le doute sur l’avenir d’un musée qui renferme pourtant un trésor unique au monde : 2,5 millions d’étoffes et échantillons textiles.
Les équipes, qui travaillent d’arrache-pied en coulisses depuis des années pour faire revivre la Belle endormie des quais de Saône, espèrent toujours un miracule. Histoire de ne pas voir un pan entier de l’histoire de la Fabrique lyonnaise, intimement liée à la soierie, tomber en lambeaux.
L’appel au mécénat privé
Pour parer au pire, l’institution travaille à tisser des partenariats avec des mécènes privés. Des discussions avec des grands noms de la mode et du luxe, en France comme à l’étranger, ont débuté pour boucler le budget de 50 millions d’euros. Un signe de la place de choix qu’occupe toujours le musée textile dans le coeur des professionnels.
Seul bémol, l’absence d’horizon clair pour l’ouverture complique ces négociations, reconnaît la direction. “Difficile de faire signer des chèques sans savoir quand le nouveau musée sera inauguré“, confie une source interne.
En attendant, les équipes font contre mauvaise fortune bon coeur. Elles continuent de faire vivre les collections hors les murs, à travers des expositions itinérantes. Une façon de rappeler au public que le musée des Tissus, même fermé, continue d’exister. Et d’espérer.