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L’épicerie de village ferme ses portes face à l’intolérance locale

Dans un village des Pyrénées-Orientales, une épicerie reprise en 2020 est contrainte de fermer. Les gérants, originaires d'ailleurs, dénoncent l'intolérance et le boycott des habitants. Retour sur une aventure entrepreneuriale brisée par le rejet de l'autre...

Quand Emmanuelle et Frédéric Dannenberger ont repris l’épicerie de Fontpédrouse en 2020, ils étaient loin d’imaginer l’issue malheureuse que connaîtrait leur aventure. Après quatre années de dur labeur, le couple a finalement dû se résoudre à fermer boutique le mois dernier. La raison ? Un boycott et une hostilité manifestes de la part des villageois, que les gérants attribuent à leurs origines étrangères à la région.

Un accueil glacial dès le premier jour

« On a été boycottés par 90 % du village car, selon des bruits qui nous sont parvenus, nous n’étions pas originaires d’ici. Ils n’ont jamais mis les pieds dans l’épicerie tout simplement car nous n’étions pas Catalans », explique Emmanuelle, 48 ans, ancienne militaire. Son mari Frédéric, 49 ans et docteur en droit, abonde dans le même sens. Dès leur installation, le couple affirme avoir ressenti une forme d’animosité de la part des locaux.

Pourtant, le projet de reprendre l’unique commerce du village semblait prometteur. Fontpédrouse, petit bourg niché au cœur des Pyrénées-Orientales, paraissait l’endroit idéal pour démarrer une nouvelle vie. Mais la réalité fut tout autre. « Nous avons senti une hostilité dès le premier jour, et c’est clairement parce que nous étions d’ailleurs », souligne Emmanuelle, amère.

Une clientèle locale quasi inexistante

Malgré tous leurs efforts pour s’intégrer et faire vivre leur commerce, les Dannenberger ont rapidement déchanté. Leur épicerie, censée être un lieu de rencontre et d’échange au cœur du village, est restée désespérément vide. « 90% des habitants ont boycotté notre boutique. Ils refusaient tout simplement d’y mettre les pieds parce que nous n’étions pas d’ici », déplore Frédéric. Un constat amer pour ce couple qui avait misé sur cette reprise pour démarrer une nouvelle vie.

L’intolérance, un fléau encore présent

Cette mésaventure met en lumière la persistance de comportements d’exclusion dans certains territoires. Selon une étude récente, près d’un tiers des français admettent avoir des préjugés envers les personnes d’origine étrangère. Un chiffre alarmant qui traduit la nécessité de poursuivre les efforts en matière d’éducation et de sensibilisation à la tolérance.

La diversité est une richesse, pas une menace. C’est en s’ouvrant à l’autre qu’une société progresse et s’enrichit.

– Jacques Toubon, ancien Défenseur des droits

Un vote révélateur

La fermeture de l’épicerie de Fontpédrouse fait écho aux résultats des dernières élections législatives dans le village. Avec près de 80% des voix en faveur du RNP, la commune affiche clairement son ancrage à l’extrême-droite. Un choix politique qui peut expliquer, sans pour autant les justifier, les comportements d’intolérance subis par Emmanuelle et Frédéric.

L’appel à l’ouverture d’esprit

« Je ne savais pas que ce genre de mentalité existait encore. C’est une déception immense », confie Emmanuelle, la voix teintée de lassitude. Son mari Frédéric, lui, veut croire que leur histoire servira de prise de conscience. « J’espère que notre mésaventure poussera les gens à réfléchir sur ces questions d’intolérance. Il est grand temps d’évoluer et d’accepter l’autre dans sa différence ».

Car au-delà de la fermeture d’un commerce, c’est bien le rejet de la différence qui est pointé du doigt. Un mal insidieux qui gangrène encore trop de communes et brise des projets de vie. Il est urgent d’agir, à tous les niveaux, pour promouvoir l’ouverture d’esprit et le vivre-ensemble. L’avenir de nos territoires en dépend.

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