Imaginez un monde où près de 700 millions de personnes survivent avec moins de 2,15 dollars par jour. Ce chiffre, révélé par la Banque mondiale en 2024, illustre l’ampleur de l’extrême pauvreté qui gangrène encore notre planète. Face à cette réalité, un nouvel élan spirituel et social émerge avec le pape Léon XIV, qui, dans son premier texte majeur, Dilexi Te, place la lutte contre la pauvreté au centre de la mission de l’Église catholique. Ce document, signé le 4 octobre, jour de la fête de saint François d’Assise, résonne comme un appel vibrant à transformer notre regard sur les marginalisés et à repenser un système économique mondial souvent injuste.
Un Message ancré dans l’Héritage de François
Le pontificat de Léon XIV s’inscrit dans la continuité de celui de son prédécesseur, le pape François, dont l’engagement pour les plus démunis a marqué les esprits. Dans Dilexi Te, ce jésuite américano-péruvien, ancien missionnaire au Pérou, reprend des thèmes chers à François, tout en y insufflant sa propre sensibilité. Le titre même du texte, qui signifie « Je t’ai aimé » en latin, fait écho à l’encyclique Dilexit nos de François, un document que ce dernier avait commencé à rédiger avant sa mort en avril, après douze ans de pontificat. Si le Vatican reste discret sur la part exacte de chacun dans ce texte, un cardinal a résumé l’esprit de l’œuvre en disant : « C’est 100 % François et 100 % Léon. »
Ce document, une exhortation apostolique, se veut à la fois spirituel et concret. Déployé en 121 points, il aborde des questions sociales, morales et spirituelles avec une tonalité résolument engagée. Léon XIV y dénonce une économie qui tue, reprenant les mots de François pour critiquer un système capitaliste dominé par la spéculation financière. Il appelle les fidèles à faire entendre une voix qui dénonce l’injustice et à agir pour un monde plus équitable.
La Pauvreté : Une Priorité Absolue
Dans Dilexi Te, Léon XIV ne se contente pas de pointer du doigt les inégalités. Il propose une véritable révolution des mentalités. « Nous devons nous engager davantage à résoudre les causes structurelles de la pauvreté », écrit-il. Cette phrase, simple mais puissante, résume l’ambition du texte : aller au-delà de la charité ponctuelle pour s’attaquer aux racines des injustices. Selon lui, le système économique mondial, marqué par une tyrannie invisible des marchés financiers, rejette les plus vulnérables et accentue les écarts entre riches et pauvres.
« Nous devons nous engager davantage à résoudre les causes structurelles de la pauvreté. »
Léon XIV, Dilexi Te
Pour illustrer son propos, Léon XIV évoque des chiffres alarmants : en 2024, 8,5 % de la population mondiale vit sous le seuil de l’extrême pauvreté. Ce constat, appuyé par les données de la Banque mondiale, sert de toile de fond à son appel à l’action. Il invite les catholiques, mais aussi l’ensemble de l’humanité, à repenser leurs priorités et à placer la dignité humaine au centre des décisions économiques et sociales.
Un Plaidoyer pour les Migrants
L’un des points forts de Dilexi Te est son engagement en faveur des migrants, une cause déjà défendue avec ferveur par François. Léon XIV, natif de Chicago et marqué par son expérience missionnaire au Pérou, insiste sur la nécessité d’accueillir ceux que le monde considère comme des « menaces ». « Là où le monde voit des menaces, l’Église voit des fils ; là où l’on construit des murs, elle construit des ponts », écrit-il. Ces mots, empreints de poésie, résonnent comme une réponse directe aux politiques migratoires restrictives, notamment aux États-Unis, où les expulsions massives décidées par le président suscitent des débats houleux.
Le pape n’hésite pas à rappeler des drames qui ont marqué les consciences, comme celui d’Alan Kurdi, cet enfant syrien de trois ans retrouvé mort sur une plage en 2015. Ce souvenir, qui avait bouleversé le monde, est utilisé pour dénoncer l’indifférence face aux naufrages de migrants, souvent relégués à de simples faits divers. Pour Léon XIV, accueillir les migrants n’est pas une option, mais un impératif moral et spirituel.
Les chiffres clés de la pauvreté mondiale :
- 700 millions de personnes vivent avec moins de 2,15 dollars par jour (Banque mondiale, 2024).
- 8,5 % de la population mondiale est en situation d’extrême pauvreté.
- Les inégalités économiques s’accentuent sous l’effet des marchés financiers.
Une Critique des Élites et de l’Hypocrisie
Membre de l’ordre mendiant de Saint-Augustin, Léon XIV n’épargne pas les élites fortunées qui, selon lui, vivent dans une « bulle de conditions luxueuses ». Il critique l’hypocrisie de certains chrétiens influencés par des « idéologies mondaines » qui s’éloignent des valeurs de charité et de simplicité prônées par l’Évangile. Cette critique, directe et sans détour, risque de provoquer des remous, notamment parmi les catholiques conservateurs, en particulier aux États-Unis, où le pape a déjà suscité des controverses en dénonçant le traitement inhumain des migrants.
Pour Léon XIV, la charité ne doit pas être un simple geste de façade, mais une démarche profonde qui engage l’ensemble de la communauté chrétienne. Il appelle à une solidarité concrète, qui passe par des actions comme le soin des malades, la lutte contre la malnutrition, la défense des femmes victimes de violence ou encore l’accès à l’éducation pour tous.
Un Texte qui Transcende les Époques
En publiant Dilexi Te, Léon XIV s’inscrit dans une longue tradition de l’Église catholique, qui, depuis deux millénaires, place la défense des plus faibles au cœur de son enseignement. Comme le souligne Fr. Frédéric-Marie Le Méhauté, théologien et provincial des frères mineurs de France-Belgique, ce texte montre que l’élan impulsé par François n’était pas une parenthèse, mais une continuité. « C’est le même enseignement qui est assumé depuis 2000 ans », affirme-t-il, soulignant la force intemporelle du message de Léon XIV.
« C’est le même enseignement qui est assumé depuis 2000 ans : Léon XIV se situe dans cet héritage. »
Fr. Frédéric-Marie Le Méhauté
Ce document, riche et dense, ne se limite pas à un appel spirituel. Il propose une vision globale de la justice sociale, où la lutte contre la pauvreté s’accompagne d’un engagement pour l’environnement, la dignité des migrants et l’éducation. Léon XIV y affirme que l’Église doit être un acteur de changement, capable de construire des ponts là où le monde érige des murs.
Vers un Monde Plus Juste
En conclusion, Dilexi Te n’est pas seulement un texte religieux. C’est un manifeste pour un monde plus humain, où la dignité de chaque personne, qu’elle soit pauvre, migrante ou marginalisée, est reconnue et protégée. Léon XIV, par son passé de missionnaire et sa sensibilité aux injustices, apporte une voix nouvelle à cet appel universel. Alors que les défis mondiaux, de la pauvreté aux migrations, continuent de croître, son message résonne comme une invitation à l’action pour tous, croyants ou non.
Priorités de Léon XIV | Actions proposées |
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Lutte contre la pauvreté | Attaquer les causes structurelles, promouvoir une économie équitable. |
Accueil des migrants | Construire des ponts, dénoncer les politiques restrictives. |
Charité et solidarité | Soins aux malades, éducation, lutte contre la malnutrition. |
Ce texte, par sa profondeur et son ambition, pourrait bien marquer le début d’un pontificat audacieux. En plaçant la lutte contre la pauvreté et l’accueil des migrants au cœur de son message, Léon XIV invite chacun à réfléchir : comment pouvons-nous, à notre échelle, contribuer à un monde plus juste ?