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L’enfer des journalistes otages de l’État islamique en Syrie

D'ex-otages français de l'EI témoignent au procès de Mehdi Nemmouche. Récit glaçant de 10 mois de captivité en Syrie, entre sévices brutaux et simulacres d'exécution. Une plongée dans l'enfer des geôles de l'État islamique...

C’est un témoignage poignant qui résonne dans le prétoire. Au procès de Mehdi Nemmouche à Paris, d’anciens otages français de l’État islamique sont venus raconter leurs dix mois de captivité en Syrie. Un enfer fait de sévices, de simulacres d’exécution et d’une peur viscérale chevillée au corps.

Arrêtés et embarqués, cagoulés

Juin 2013, dans le nord de la Syrie. La voiture des journalistes Édouard Élias et Didier François est stoppée net. « Cagoule sur la tête, mains dans le dos, on nous embarque dans une camionnette », relate le premier, âgé de 22 ans à l’époque. Une scène glaçante qui marque le début d’un long calvaire.

Quelques instants plus tard, genoux à terre, kalachnikov sur la tempe. « Premier simulacre d’exécution, ça fait bizarre », confie Édouard Élias d’une voix calme. Mais au fil des jours, dit-il, « on s’habitue ». Un constat terrible qui en dit long sur l’horreur vécue.

Attachés et tabassés à l’hôpital d’Alep

Leur premier lieu de détention ? L’hôpital d’Alep, transformé en sinistre geôle. Quatre jours attachés à un radiateur, sans eau ni nourriture. Les coups pleuvent. « Une horreur absolue » peuplée des cris continus de détenus agonisants, décrit Édouard Élias. Une vision d’enfer, avec ces hommes suspendus au plafond, roués de coups.

« Des monceaux d’êtres humains en train de geindre, des cadavres vivants. »

Édouard Élias, ex-otage en Syrie

Mais les otages occidentaux, eux, ont « une valeur particulière ». On ne les tuera pas comme ça, dans un sous-sol comme les milliers d’anonymes syriens. Cette prise de conscience ne rend leur sort guère plus enviable pour autant.

La force du chant des partisans

Un jour pourtant, une lueur d’espoir. Un cri en français retentit d’une cellule voisine : « AMI ! ». Comme mu par un réflexe, Édouard Élias se met à chanter. « Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu’on enchaîne ? ». Didier François, lui aussi détenu près de lui, reprend en chœur. Un instant suspendu, une force insoupçonnée.

Geôliers sans pitié et otages exécutés

Durant leur détention avec d’autres otages occidentaux, dont James Foley et David Haines, la faim tenaille. L’ennui ronge. Chaque soir, pour tenir, ils répertorient le moindre détail, le nombre de pas jusqu’aux toilettes, jusqu’à la salle de torture. Une stratégie de survie face à des geôliers sans merci, dont Mehdi Nemmouche.

Car pour les ex-otages, aucun doute : la voix qui leur « faisait vivre l’enfer » en Syrie, qui les « terrorisait » et les « faisait chier en cellule », c’est bien celle de l’accusé dans le box. Celui qui se faisait siffloter « Douce France » pour mieux les tourmenter. Un bourreau parmi d’autres, dans le vaste engrenage des geôles de l’EI.

Libérés en avril 2014, Édouard Élias et Didier François reviennent de loin. Leur témoignage est un devoir, un besoin vital. Pour eux-mêmes, pour ceux qui n’ont pas survécu. James Foley, David Haines et d’autres, exécutés froidement devant une caméra à des fins de propagande. Leur calvaire, raconté sans fard, met en lumière la cruauté des hommes. Mais aussi la force de l’esprit face à la barbarie.

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