L’Église catholique belge vient d’être secouée par une décision de justice sans précédent. Le tribunal civil de Malines a en effet jugé coupable de discrimination l’archevêché pour avoir refusé à une femme, Veer Dusauchoit, l’accès à la formation de diacre. Une fonction jusqu’ici réservée aux hommes au sein de l’institution religieuse. Cette condamnation historique pourrait-elle faire jurisprudence et bousculer les traditions multiséculaires de l’Église ?
Un double refus jugé discriminatoire
Tout commence en juin 2023 lorsque Veer Dusauchoit postule pour devenir diacre. Mais elle essuie un premier refus de la part de l’archevêque de l’époque, Mgr Jozef De Kesel, au motif que les femmes ne peuvent accéder à ce ministère selon le droit canon. Déterminée, elle retente sa chance quelques mois plus tard auprès du nouvel archevêque, Mgr Luc Terlinden, mais se heurte à la même fin de non-recevoir.
Estimant que ce double refus constitue une discrimination basée sur le sexe, en contradiction avec la Constitution belge, Veer Dusauchoit décide alors de saisir la justice. Et le tribunal lui donne raison, jugeant les deux prélats coupables de discrimination. Une « faute dans l’appréciation de la candidature » selon les mots du tribunal, qui précise toutefois n’avoir aucune compétence pour annuler ces refus ou définir qui peut devenir diacre.
Le diaconat, premier pas vers la prêtrise
Mais qu’est-ce qu’un diacre au juste ? Il s’agit du premier degré du sacrement de l’ordre dans l’Église catholique. Le diacre, qui peut être marié ou célibataire, assiste le prêtre ou l’évêque lors des célébrations. Il peut proclamer l’Évangile, prêcher, célébrer des baptêmes et des mariages. C’est en quelque sorte l’antichambre de la prêtrise, réservée elle aux hommes célibataires. Une fonction donc encore inaccessible aux femmes, malgré les demandes répétées de certains fidèles et théologiens.
«Les femmes sont d’un grand service en tant que femmes, pas en tant que ministres au sein des ordres sacrés.»
Pape François, mai 2023
Vers une remise en cause des traditions ?
Cette condamnation pour discrimination pourrait-elle faire bouger les lignes au sein de l’Église ? Rien n’est moins sûr. Le pape François lui-même avait clairement fermé la porte à l’ordination des femmes diacres en mai dernier, même s’il appelait à réfléchir plus largement à leur place dans l’institution.
Mais cette décision de justice belge, une première, montre que la société civile est prête à remettre en cause certaines traditions religieuses au nom de l’égalité hommes-femmes. Une pression supplémentaire sur une Église déjà fragilisée par la crise des vocations et les scandales à répétition.
Certains y voient le début d’une révolution qui pourrait ébranler les fondements même de l’institution pluriséculaire. D’autres, une simple péripétie juridique sans réelle portée ecclésiastique. Une chose est sûre : le débat sur la place et le rôle des femmes au sein de l’Église catholique est loin d’être clos. Et il pourrait réserver encore bien des surprises dans les années à venir.