L’Allemagne est encore sous le choc de l’attentat meurtrier perpétré vendredi soir sur le marché de Noël de Magdebourg, dans l’est du pays. Un camion a foncé dans la foule, faisant au moins 5 morts et 200 blessés selon un bilan encore provisoire. Mais le drame a déjà des répercussions politiques majeures, à deux mois des élections législatives anticipées provoquées par la chute du gouvernement d’Olaf Scholz.
Le principal suspect, un ressortissant saoudien de 50 ans du nom de Taleb A., a été rapidement interpellé par la police. Mais les zones d’ombre entourant son profil et ses motivations alimentent toutes les spéculations et les tentatives de récupération. Psychiatre arrivé en Allemagne en 2006, l’homme se disait « islamophobe » et soutenait l’extrême-droite sur les réseaux sociaux.
L’extrême-droite alemande se déchaîne
Dès samedi soir, des groupuscules néonazis venus de tout le pays ont manifesté à Magdebourg, encadrés par Thorsten Heise, le chef du parti ultra Die Heimat (« La Patrie »). Des slogans comme « Allemagne réveille-toi », jadis scandés par les SA hitlériennes, ont résonné dans les rues. L’AfD, le parti d’extrême-droite qui prône des « remigrations par millions », appelle à d’autres rassemblements dans les prochains jours.
Ils vont venir manifester toutes les 48 heures
prédit Alexandre Mochée, un Français vivant à Magdebourg
De son côté, Olaf Scholz a appelé les Allemands à « faire rempart contre la haine ». Le candidat conservateur Friedrich Merz a jugé « insupportable que nous ne puissions nous rassembler en toute insouciance ». Quant à Alice Weidel, cheffe de file de l’AfD, elle veut « arrêter cette folie », en référence à l’immigration.
Une radicalisation connue des autorités
Pourtant, selon plusieurs médias, l’ambassade saoudienne avait alerté Berlin à trois reprises ces dernières années sur la radicalisation de Taleb A. Un habitué des menaces sur internet, capable d’écrire 250 messages par semaine. Les autorités avaient néanmoins conclu qu’il ne représentait « aucun danger concret« .
L’Allemagne a déjà été frappée par des attentats islamistes, comme à Berlin en 2016 ou à Solingen en août dernier. Mais aussi par des tueries racistes d’extrême-droite, à Munich en 2016 ou à Halle en 2019. Le cas de Magdebourg, d’un musulman converti à la haine des musulmans, brouille les pistes.
Vers une réforme des services de sécurité ?
Face aux interrogations des citoyens, les candidats aux législatives du 23 février sont pressés d’apporter des réponses concrètes :
- Faut-il réformer le système des renseignements intérieurs et la justice, jugés défaillants ?
- Renforcer le maillage des hôpitaux psychiatriques, démantelés par l’austérité ?
- Mieux réguler les réseaux sociaux, vecteurs de radicalisation ?
Des questions cruciales pour rassurer une opinion sous le choc et éviter le chaos dans un pays hanté par les démons de son histoire. À deux mois des urnes, le drame de Magdebourg redistribue les cartes. Et met la sécurité au cœur de la campagne.