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Législatives 2024 : Une candidate féministe face à la polémique Quatennens

Quand le féminisme s'invite aux législatives. Amy Bah, militante engagée, défie Adrien Quatennens dans son fief du Nord. Un duel explosif qui cristallise les tensions à gauche sur la question des violences conjugales. Mais au-delà des personnes, ce sont deux visions de la société qui s'affrontent...

C’est une candidature qui ne passe pas inaperçue. En pleine période de préparation des élections législatives de 2024, Amy Bah, militante féministe engagée, a décidé de se présenter dans la 1ère circonscription du Nord. Face à elle, un adversaire de taille : le député sortant Adrien Quatennens, figure controversée de la France Insoumise, condamné en décembre dernier à 4 mois de prison avec sursis pour violences conjugales. Au-delà de l’affrontement entre deux personnalités, ce sont deux visions de la société qui se télescopent.

Le féminisme comme étendard politique

Pour Amy Bah, cette candidature est avant tout un acte militant. Membre active du collectif #NousToutes qui lutte contre les violences sexistes et sexuelles, elle veut porter sur le devant de la scène politique la question des droits des femmes. “Je suis candidate pour voir une gauche forte et unie, celle qui porte toutes les valeurs du nouveau Front populaire”, martèle-t-elle dans son communiqué de candidature.

Un nouveau Front populaire version féministe donc, qui tranche avec l’investiture contestée d’Adrien Quatennens par LFI. De nombreuses voix à gauche se sont élevées contre ce choix, y voyant un signal désastreux envoyé sur la question des violences faites aux femmes. Le premier secrétaire du PS Olivier Faure a dénoncé une “faute politique”, tandis que la secrétaire nationale d’EELV Marine Tondelier a jugé cette décision “indigne des combats féministes”.

Je refuse de laisser les clés de l’Assemblée à un homme condamné pour violences conjugales. Notre combat féministe mérite mieux que ça.

Amy Bah, candidate féministe dans le Nord

Un duel politique et symbolique

En se présentant face à Adrien Quatennens, Amy Bah bouscule donc le jeu politique à gauche. Elle répond à une demande d’une partie des militants et des électeurs qui ne se retrouvent pas dans la position de LFI sur cette question sociétale majeure. Un sondage récent montre que 62% des sympathisants de gauche sont opposés à la candidature de l’ex-numéro 2 des Insoumis.

Mais au-delà des rapports de force électoraux, ce duel revêt une forte dimension symbolique. Il met en scène l’affrontement entre deux figures antagonistes : un homme politique fragilisé par une condamnation pour violences conjugales face à une militante féministe déterminée à bousculer le système. Un face-à-face qui cristallise toutes les ambiguïtés de la gauche sur les questions de société et d’égalité femmes-hommes.

Quel héritage pour le Front populaire ?

En invoquant l’héritage du Front populaire, Amy Bah replace aussi son combat dans une perspective historique. Ce mouvement, qui a profondément marqué la gauche française dans les années 30, a porté de grandes avancées sociales comme les congés payés ou les 40 heures. Mais il a aussi été critiqué pour son attitude vis-à-vis des droits des femmes, maintenues dans un rôle subalterne.

En se revendiquant de ces “valeurs du Front populaire” tout en y insufflant une dose de radicalité féministe, la candidate nordiste bouscule donc aussi l’héritage de la gauche. Elle propose en quelque sorte un Front populaire 2.0, adapté aux combats d’aujourd’hui sur l’égalité et la lutte contre les violences sexistes.

Une candidature qui divise la gauche

Mais cette candidature ne fait pas l’unanimité côté gauche. Si elle a reçu le soutien appuyé de la maire de Lille Martine Aubry, d’autres figures restent plus mesurées. Jean-Luc Mélenchon a dénoncé une candidature “de division” qui risque de faire le jeu de la droite et de l’extrême-droite. Chez EELV aussi, si la direction soutient le principe d’une candidature féministe, certains cadres locaux craignent une dispersion des voix.

Amy Bah, elle, assume son choix. Pour elle, les législatives sont une occasion unique de faire bouger les lignes sur la question des violences conjugales et de l’égalité. Quitte à bousculer les appareils politiques. “J’entends les arguments sur le risque de division. Mais le combat féministe ne peut plus attendre. Il est urgent d’agir, de changer la donne politique”, insiste-t-elle.

Au-delà des clivages, un débat de société

Au final, au-delà des clivages partisans, cette candidature a le mérite de mettre sur la table un débat de société majeur. Comment sanctionner les violences conjugales en politique ? Quelle place pour le féminisme dans le débat public ? Comment renouveler le logiciel de la gauche sur les questions d’égalité ? Autant de questions qui animeront la campagne des législatives.

Et quel que soit le résultat des urnes, une chose est sûre : la candidature d’Amy Bah aura permis de faire bouger les lignes. En posant ses conditions, en refusant les compromis, en portant son combat sur le terrain politique, elle ouvre une brèche dans laquelle d’autres s’engouffreront peut-être. Avec l’espoir, qu’à l’avenir, le féminisme ne soit plus un combat mais une évidence partagée, à gauche comme dans le reste de la société.

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