À l’heure où le Rassemblement National est arrivé largement en tête du premier tour des élections législatives 2024, la question du “ni-ni” – ne choisir ni l’extrême droite, ni la gauche radicale en cas de duel – déchaîne les passions dans la classe politique française. Un dilemme cornélien qui soulève de profondes interrogations sur la stratégie à adopter pour préserver les valeurs républicaines.
Le spectre du Rassemblement National aux portes du pouvoir
Avec des scores inédits, dépassant les 30% au niveau national, le parti d’extrême droite mené par Marine Le Pen s’impose comme la première force politique à l’Assemblée Nationale. Un séisme qui rebat les cartes du jeu politique et place les autres formations devant un choix crucial pour le second tour : faire barrage au RN coûte que coûte, ou maintenir ses positions par conviction.
Face au danger, le ni-ni n’est pas de mise.
– Laurent Berger, ancien secrétaire général de la CFDT
Pour l’ancien leader syndical, “aucune voix ne doit manquer au désistement républicain” face à un RN qui représente une menace pour la démocratie et les valeurs de la République. Un appel qui résonne comme un écho du “front républicain” théorisé par Jacques Chirac en 2002.
La droite et la majorité présidentielle divisées
Mais au sein des Républicains comme de la majorité macroniste, la position est loin d’être unanime. Si certains, à l’instar d’Édouard Philippe, plaident pour une opposition ferme à la fois au RN et à la France Insoumise, d’autres refusent de choisir entre “la peste et le choléra”. Une posture qui fait craindre une dispersion des voix pouvant paradoxalement profiter à l’extrême droite.
Les Républicains s’abstiennent de toute consigne de vote au second tour.
– Direction des Républicains
Vers un nombre record de triangulaires
Avec potentiellement jusqu’à 306 duels à trois au second tour entre la NUPES, le RN et le camp présidentiel, le tripartisme s’installe dans le débat politique. Une configuration dangereuse qui pourrait mécaniquement avantager le Rassemblement National en lui permettant de l’emporter grâce à la division de ses opposants.
Le spectre d’une cohabitation ou même d’une majorité RN hante désormais les esprits. Un scénario catastrophe pour beaucoup qui en appellent à la “responsabilité” des uns et des autres. Car au-delà des combats politiques, c’est bien l’avenir de la démocratie française qui se joue dans les urnes dimanche prochain.
Face à ce séisme politique, chaque camp est donc sommé de clarifier sa position dans un débat qui s’annonce décisif. Faut-il à tout prix barrer la route à l’extrême droite quitte à renier ses convictions, ou défendre jusqu’au bout sa ligne au risque de lui offrir les clés du pouvoir ? Une équation à multiples inconnues dont dépendra le visage de l’Assemblée nationale pour les cinq prochaines années.