Les marchés financiers asiatiques ont été secoués ce jeudi par un véritable séisme monétaire. Au cœur de la tempête : le yen japonais, qui a plongé face au dollar après un double choc inattendu. D’un côté, la Banque du Japon (BoJ) a choisi de maintenir inchangé son taux directeur malgré une inflation persistante. De l’autre, la Réserve fédérale américaine (Fed) a surpris par sa prudence, ne prévoyant que deux hausses de taux en 2023 au lieu des quatre anticipées.
La BoJ campe sur ses positions, le yen trinque
Contre toute attente, la BoJ a décidé de maintenir son taux directeur à un plancher de 0,25%. Une décision justifiée par les « incertitudes élevées » planant sur l’économie et l’inflation nippones, selon l’institution. Pourtant, nombre d’analystes tablaient sur un resserrement monétaire dès cette réunion de décembre.
La réaction des marchés a été immédiate et brutale. Vers 03h30 GMT, le dollar s’échangeait pour 155,37 yens, contre 154,80 yens la veille. Une dégringolade qui illustre l’écart grandissant entre les politiques des banques centrales japonaise et américaine.
La Fed déjoue les pronostics et assène le coup de grâce
Le coup de massue est venu de l’autre côté du Pacifique. Mercredi, la Fed a certes relevé son taux directeur d’un quart de point, comme attendu. Mais elle a surtout revu à la baisse ses projections, tablant désormais sur seulement deux hausses en 2023, et non plus quatre. Un changement de cap qui a pris les marchés à contre-pied.
La Fed a maintenant abaissé ses taux d’un point de pourcentage depuis septembre, mais le terrain économique américain a changé de manière spectaculaire depuis.
Stephen Innes, SPI Asset Management
Tokyo vacille, les secteurs sous pression
Résultat des courses : la Bourse de Tokyo a trébuché ce jeudi. À 03h45 GMT, l’indice vedette Nikkei cédait 0,84% à 38.753,22 points et l’indice élargi Topix abandonnait 0,28% à 2.712,33 points. Un repli d’autant plus notable que le yen faible est généralement un moteur pour les actions japonaises.
Dans le sillage de la déconvenue de l’américain Micron, poids lourd des semi-conducteurs, une partie du secteur high-tech nippon souffrait également. Tokyo Electron lâchait 1,8% et Advantest 2,71%. À l’inverse, le titre Nissan poursuivait son envol avec un gain de 6,4%, dopé par des spéculations de rapprochement avec Honda.
L’Asie dans le rouge, l’or noir en berne
La déprime japonaise contaminait les autres grandes places asiatiques. À Hong Kong, l’indice Hang Seng perdait 1,01%. En Chine continentale, l’indice composite de Shanghai lâchait 0,7% et celui de Shenzhen 0,75%.
Signe supplémentaire d’un regain d’aversion au risque, le marché du pétrole virait également au rouge. Le prix du baril de WTI reculait de 0,55% à 70,19 dollars, celui de Brent de la mer du Nord de 0,38% à 73,11 dollars. Les turbulences monétaires faisaient clairement des vagues bien au-delà des frontières nippones.
Cette journée tumultueuse sur les marchés asiatiques illustre à quel point les décisions des grandes banques centrales peuvent ébranler l’économie mondiale. Le statu quo de la BoJ face à une inflation persistante et la prudence inattendue de la Fed ont envoyé des ondes de choc sur les marchés des changes et les places boursières. Une volatilité qui pourrait perdurer tant que les trajectoires monétaires du Japon et des États-Unis divergeront. Les investisseurs, eux, restent sur le qui-vive.