Un séisme électoral. Les élections européennes du 9 juin 2024 ont été marquées par une poussée sans précédent du vote catholique en faveur de l’extrême droite. Selon un sondage Ifop pour La Croix, pas moins de 42% des catholiques pratiquants ont choisi des listes situées à l’extrême droite de l’échiquier politique. Un chiffre sidérant, en hausse de 24 points par rapport à 2019. Jamais dans l’histoire de la Ve République, cet électorat ne s’était autant tourné vers les franges radicales. Que révèle ce basculement ?
Les raisons d’un choix “anticatholique”
Le vote catholique en faveur de l’extrême droite interroge, tant il semble paradoxal. Pourquoi une religion prônant l’amour du prochain, l’accueil de l’étranger, se tourne-t-elle vers des partis prompts à rejeter l’autre ? Pour Florence, une fidèle, la question de l’immigration “gêne beaucoup”, mais le manque de “solutions satisfaisantes” des partis modérés pour “accompagner les migrants” l’a poussée vers ce choix. Un constat partagé par Marc, pour qui malgré le côté “anticatholique”, l’extrême droite est un rempart contre “trop d’étrangers” et les “grabuges en France”.
Au-delà de l’enjeu migratoire, central dans ce vote, d’autres raisons expliquent ce glissement :
- Le rejet des valeurs libérales et de la “déconstruction” portées par les autres partis
- La volonté de défendre “l’identité chrétienne” de la France face à l’Islam
- La déception envers la majorité présidentielle, plébiscitée en 2019
- L’attractivité du discours traditionnel sur la famille et la morale
Le Rassemblement national et Reconquête! grands gagnants
Dans le détail, ce sont les deux principales formations d’extrême droite qui captent l’essentiel du vote catholique. La liste RN menée par Jordan Bardella arrive largement en tête avec 32%, talonnée par Reconquête! et ses 10%.
Marion Maréchal, tête de liste de Reconquête!, a résolument joué la carte de la défense de “l’identité chrétienne” durant la campagne, séduisant ainsi une part importante de l’électorat catholique.
Sondage Ifop pour La Croix
A elles deux, ces listes raflent donc 42% des voix catholiques, soit plus du double par rapport à 2019 (18%). Un niveau jamais atteint sous la Ve République.
Effondrement de la majorité présidentielle chez les catholiques
Dans le même temps, la majorité présidentielle d’Emmanuel Macron, qui avait séduit massivement les catholiques en 2019, s’effondre dans cet électorat. Un désaveu cinglant qui s’explique en partie par :
- Les positions jugées trop libérales, en décalage avec la sensibilité catholique
- La gestion perçue comme brouillonne de la crise migratoire
- L’usure du pouvoir après deux mandats
Au final, ce séisme du vote catholique en faveur de l’extrême droite bouscule en profondeur le rapport entre la foi et la politique. Il montre la montée d’une droite identitaire et traditionaliste dans une frange de l’électorat qui cherche à défendre ses valeurs. Un signal fort, qui ne manquera pas de peser dans les échéances électorales à venir.