La question du temps de travail en France revient sur le devant de la scène avec les récentes déclarations de l’ancien ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. Dans une interview accordée aux Échos, le député du Nord propose plusieurs mesures pour réduire la dépense publique, dont la fin des 35 heures dans le secteur privé et une augmentation du temps de travail dans la fonction publique. Des propositions qui ne manquent pas de faire réagir syndicats et politiques.
Mettre fin aux 35 heures dans le privé
Gérald Darmanin estime que pour faire baisser la dépense publique, il faut s’attaquer au temps de travail. Selon lui, “on ne travaille pas assez” en France. Il propose donc de “mettre fin définitivement aux 35 heures dans le privé et renvoyer le temps de travail au dialogue dans l’entreprise en échange d’intéressement et de participation”. Une mesure qui permettrait, d’après l’ancien ministre, de stimuler la croissance économique.
Réactions des syndicats
Sans surprise, les organisations syndicales s’opposent fermement à cette proposition. Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, dénonce une “provocation” et rappelle l’attachement des Français aux 35 heures :
Les 35 heures sont un acquis social important. Vouloir y mettre fin, c’est méconnaître la réalité du monde du travail et les aspirations des salariés à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et personnelle.
Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT
De son côté, Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, parle d’une proposition “inefficace et injuste” qui ne ferait qu’aggraver les inégalités.
Position du gouvernement
Le gouvernement se montre pour l’instant prudent sur le sujet. Elisabeth Borne, Première ministre, a déclaré que la question du temps de travail n’était “pas une priorité” et qu’elle privilégiait le dialogue social dans les entreprises. Elle a toutefois rappelé la nécessité de maîtriser les dépenses publiques.
Augmenter le temps de travail dans le public
Outre la fin des 35 heures dans le privé, Gérald Darmanin suggère de passer à 36 ou 37 heures dans la fonction publique, “bien sûr payées en conséquence”. Il évoque également la suppression d’un “deuxième jour férié” et la mise en place d’un “deuxième jour de carence pour les arrêts maladie”.
Un sujet sensible
Ces propositions risquent de se heurter à une forte opposition des syndicats de fonctionnaires. Déjà mobilisés contre la réforme des retraites, ils pourraient voir dans ces mesures une nouvelle attaque contre le statut et les conditions de travail des agents publics.
Le gouvernement devra donc faire preuve de pédagogie et de concertation s’il décide d’ouvrir ce dossier. D’autant que la question du temps de travail dans la fonction publique est étroitement liée à celle des effectifs et des missions de service public.
D’autres pistes de réforme
Pour réduire la dépense publique, Gérald Darmanin avance d’autres idées comme la vente des participations de l’État dans plusieurs entreprises (Orange, FDJ, Stellantis, Engie) ou encore une réforme de l’audiovisuel public. Des sujets qui pourraient susciter un vif débat dans les prochains mois.
Quel avenir pour le temps de travail en France ?
Les déclarations de Gérald Darmanin relancent le débat sur le temps de travail en France, près de 25 ans après le passage aux 35 heures. Si cette durée légale reste une référence pour beaucoup de salariés et de syndicats, elle est régulièrement remise en cause par une partie du patronat et de la droite.
L’enjeu est de trouver un équilibre entre les impératifs économiques (compétitivité des entreprises, maîtrise des dépenses publiques) et les aspirations sociales (qualité de vie au travail, partage du temps de travail). Un équilibre qui passe sans doute par un dialogue social renforcé, tant au niveau national qu’au sein des entreprises et des administrations.
Car au-delà de la durée légale, c’est bien l’organisation et les conditions de travail qui sont en jeu. Avec le développement du télétravail, l’essor des outils numériques et l’évolution des modes de vie, les frontières entre temps professionnel et personnel sont de plus en plus poreuses. Une réalité qui appelle de nouvelles régulations et protections pour les travailleurs.
Dans ce contexte, la question du temps de travail ne peut être abordée de manière isolée ou dogmatique. Elle doit s’inscrire dans une réflexion plus large sur l’avenir du travail et notre modèle social, en prenant en compte les attentes et les contraintes de tous les acteurs. Un chantier aussi complexe que crucial pour les années à venir.