ActualitésPolitique

Le Technocrate Antivax et Prorusse Fait Sensation sur TikTok

Calin Georgescu, technocrate prorusse et antivax, crée la surprise au 1er tour de la présidentielle roumaine grâce à une campagne choc sur TikTok. Son parcours atypique et ses positions clivantes suscitent l'engouement, mais aussi la controverse. Découvrez les dessous d'une ascension inattendue qui bouscule le paysage politique roumain...

Calin Georgescu, technocrate roumain de 62 ans, a créé la surprise en arrivant en tête du premier tour de l’élection présidentielle roumaine avec près de 23% des voix. Quasi-inconnu du grand public il y a encore quelques mois, ce candidat atypique a mené une campagne choc sur les réseaux sociaux, en particulier TikTok, où ses vidéos antivax et prorusses ont été vues des millions de fois. Son positionnement clivant et son style détonnant ont séduit de nombreux électeurs, inquiets du conflit en Ukraine et en quête d’un dirigeant rassurant. Mais son ascension fulgurante soulève aussi de nombreuses questions sur son parcours et ses véritables intentions.

Un technocrate discret propulsé sous les projecteurs

Diplômé en agronomie de l’Université de Bucarest, Calin Georgescu a commencé sa carrière dans les ministères roumains au début des années 1990, d’abord à l’Environnement puis aux Affaires étrangères. Bien qu’envisagé un temps comme possible Premier ministre dans les années 2010, il est longtemps resté dans l’ombre des arcanes du pouvoir. C’est la pandémie de Covid-19 qui l’a véritablement propulsé sur le devant de la scène, lui permettant de diffuser un discours complotiste qui a trouvé un large écho.

Sur les réseaux sociaux, et en particulier TikTok très prisé des jeunes, ses vidéos le mettant en scène dans des décors naturels, plongeant dans un lac gelé ou méditant en montagne, accompagnées de musiques mystiques, ont rencontré un succès fulgurant. Prônant « sa foi en Dieu » et exaltant « la force de son système immunitaire », il y revendique une forme de « liberté » face aux contraintes sanitaires. Un positionnement antivax assumé qui a séduit de nombreux Roumains, désorientés par les restrictions liées à la crise du coronavirus.

Une campagne 2.0 à l’écart des médias traditionnels

Surfant sur le climat de défiance envers les élites et les institutions, Calin Georgescu a mené campagne principalement sur Internet et les réseaux sociaux, délaissant volontairement les médias classiques. Une stratégie payante selon les experts, qui soulignent qu’il a ainsi pu passer « sous les radars », échappant aux attaques de ses adversaires et au décryptage critique de son parcours. Quand dimanche il s’est rendu aux urnes au bras de son épouse naturopathe, aucune chaîne de télévision n’était d’ailleurs présente pour immortaliser l’instant.

Internet est le seul espace de liberté d’expression

Calin Georgescu, dans une de ses vidéos de campagne

Pour le sociologue Gelu Duminica, son succès s’explique aussi par le fait que de nombreux électeurs indécis et déçus des partis traditionnels ont vu en lui « un sauveur », capable de les protéger et d’unir le pays. Un « homme intègre, sérieux et patriote » susceptible d’incarner le changement, affirme Maria Chis, une retraitée de 70 ans séduite par le personnage. Mais ce profil de « père de la nation » dissimule en réalité des zones d’ombre et des prises de position controversées.

Des accointances avec l’extrême droite et le Kremlin qui interrogent

Calin Georgescu a en effet un temps été lié à AUR, le parti d’extrême droite roumain, avant de s’en éloigner en raison de prises de position trop radicales à son goût. Il a notamment défendu Corneliu Codreanu, dirigeant fasciste de la Garde de fer dans l’entre-deux-guerres, et le maréchal Ion Antonescu, allié de l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale. Des références historiques sulfureuses qui font débat en Roumanie.

Mais c’est surtout son positionnement géopolitique prorusse qui interroge, dans un pays qui craint l’expansionnisme de Moscou. Admirateur déclaré de Vladimir Poutine, « l’un des rares dirigeants dignes de ce nom » selon lui, Calin Georgescu a plusieurs fois dénoncé l’Otan, dont il remet en cause la présence sur le sol roumain. Il s’est également opposé à l’aide militaire apportée à l’Ukraine, refusant d’être « entraîné dans un conflit qui n’est pas le nôtre ». Une rhétorique dangereusement proche de celle du Kremlin, qui suscite l’inquiétude des alliés occidentaux de Bucarest.

Une ascension politique « sans précédent » qui bouscule la donne

Pour le politologue Remus Stefureac, la percée surprise de ce candidat atypique est « sans précédent » dans l’histoire démocratique récente du pays. Elle témoigne d’une soif de changement et d’un profond malaise au sein de la société roumaine, sur fond de crise économique et sociale et de peur d’un embrasement régional. Mais elle soulève aussi des questions quant à la solidité des institutions et au risque de dérive populiste.

Arrivé largement en tête du premier tour grâce à sa campagne non-conventionnelle, Calin Georgescu va maintenant devoir affronter ses adversaires dans l’arène médiatique traditionnelle et être soumis à un examen beaucoup plus approfondi de son projet et de sa personnalité. Les prochaines semaines s’annoncent donc décisives, tant pour son avenir politique personnel que pour celui de la Roumanie, à un moment charnière de son histoire. L’irrésistible ascension de ce technocrate antivax et prorusse, propulsé au sommet par les réseaux sociaux, en dit long sur les turbulences que traverse le pays. Mais elle ne préjuge en rien de l’issue finale du scrutin.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.