Face aux accusations d’amplifier la guerre au Soudan en fournissant des armes aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), le Tchad a vigoureusement démenti toute ingérence dans ce conflit qui ravage le pays voisin depuis avril 2023. Abderaman Koulamallah, ministre tchadien des Affaires étrangères et porte-parole du gouvernement, a réaffirmé la position de son pays lors d’un entretien accordé à RFI ce jeudi.
« Le Tchad n’a aucun intérêt à alimenter cette guerre dévastatrice qui a déjà des répercussions importantes sur notre territoire », a-t-il souligné avec force. « Nous sommes pour la paix et ne soutenons aucune des factions qui s’affrontent au Soudan. » Le ministre réagissait ainsi aux graves accusations lancées la veille par Minni Arcou Minnawi, gouverneur du Darfour et chef d’une faction ralliée au gouvernement soudanais.
Un rapport onusien pointe du doigt le rôle du Tchad
Ce n’est pas la première fois que le Tchad est mis en cause dans ce conflit sanglant. En janvier 2024, un rapport de l’ONU avait déjà évoqué son rôle présumé dans le transit d’armes fournies par les Émirats arabes unis aux FSR, des accusations alors réfutées par N’Djamena et Abou Dhabi. Mais selon un nouveau rapport du Sudan Conflict Observatory publié récemment, cet approvisionnement se serait poursuivi jusqu’en mai dernier via l’aéroport international Maréchal Idriss Deby d’Amdjarass au Tchad.
Des livraisons d’armes qui passeraient par différentes voies
D’après le gouverneur du Darfour, d’importantes quantités de matériel militaire continueraient de transiter par le Tchad vers le Soudan, empruntant différents aéroports tchadiens mais aussi le port camerounais de Douala avant de passer la frontière à Adré. Des affirmations balayées par le chef de la diplomatie tchadienne qui dénonce des « informations fantaisistes » et une tendance des Soudanais à rejeter la faute sur les pays voisins.
L’Iran également pointé du doigt pour son soutien à l’armée
Dans le même temps, le rapport du Sudan Conflict Observatory accuse aussi l’Iran d’avoir livré des armes à l’armée soudanaise entre décembre 2023 et juillet 2024, via l’aéroport de Port Soudan. Une différence de taille cependant pour le gouverneur du Darfour qui souligne qu’il s’agit là de contrats officiels conclus par une institution nationale, contrairement aux livraisons clandestines destinées à une « milice familiale soutenue par les Émirats ».
Une crise humanitaire sans précédent
Quoi qu’il en soit, cette guerre fratricide au Soudan a déjà fait des dizaines de milliers de morts, même si le bilan exact reste difficile à établir, la plupart des victimes n’étant pas recensées. Selon les estimations, entre 20 000 et 150 000 personnes auraient perdu la vie dans ces affrontements qui ont aussi provoqué l’exode de plus de 10 millions de Soudanais, soit un cinquième de la population.
Plus de 3 millions ont trouvé refuge dans les pays voisins, dont le Tchad, créant l’une des pires crises humanitaires de mémoire récente d’après l’ONU. Une situation dramatique qui ne peut laisser indifférent et appelle à une mobilisation urgente de la communauté internationale pour mettre un terme à ce cycle infernal de violences et venir en aide aux populations civiles prises en étau.