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Le suprémaciste noir Kemi Seba nommé conseiller spécial au Niger

Kemi Seba, suprémaciste noir déchu de sa nationalité française, nommé conseiller spécial de la junte au Niger. Le militant panafricaniste pro-russe affiche son influence grandissante dans un Sahel en pleine reconfiguration géopolitique. Quelles conséquences pour la région ?

Il était persona non grata en France, le voilà propulsé au cœur du pouvoir au Niger. Kemi Seba, militant panafricaniste et suprémaciste noir notoire, a annoncé sa nomination comme « conseiller spécial » du général Abdourahamane Tiani, chef de la junte qui a renversé le président nigérien Mohamed Bazoum le 26 juillet dernier. Une ascension fulgurante pour ce Français d’origine béninoise de 42 ans, déchu il y a quelques semaines de sa nationalité pour ses propos « hostiles à la France et aux intérêts français en Afrique ».

De la Tribu Ka au palais présidentiel de Niamey

Né Stellio Gilles Robert Capo Chichi à Strasbourg, Kemi Seba s’est fait connaître dans les années 2000 comme leader de la Tribu Ka, groupuscule suprémaciste noir et antisémite dissous en 2006. Condamné pour incitation à la haine raciale et violences, il se tourne vers le panafricanisme et multiplie les allers-retours entre la France et l’Afrique, se posant en pourfendeur du « néocolonialisme français ».

Sa rhétorique anti-française trouve un écho grandissant dans une partie de la jeunesse africaine. Mais elle déplaît en haut lieu. Le 8 juillet 2023, le gouvernement français prononce la déchéance de sa nationalité. Kemi Seba prend les devants en brûlant son passeport tricolore devant les caméras :

« Votre passeport, ce n’est pas un os que vous nous donnez ou nous retirez en fonction de notre degré de soumission vis-à-vis de vous, comme si les noirs étaient des chiens ! »

Kemi Seba, le 16 mars 2023

Dans les petits papiers de la « Russafrique »

Quelques semaines plus tard, l’activiste apparaît tout sourire sur les réseaux sociaux, brandissant un passeport diplomatique nigérien. Une provocation assumée envers Paris, alors que les relations entre la France et son ancienne colonie se sont brutalement dégradées depuis le coup d’État. Le régime du général Tiani accuse la France de vouloir déstabiliser le pays et de soutenir des « terroristes », des allégations fermement démenties par Paris.

Le rapprochement entre Kemi Seba et la junte n’est pas un hasard. L’homme est réputé proche de Moscou et a ses entrées auprès des putschistes sahéliens qui ont chassé la France pour se tourner vers la Russie. Selon une enquête de Jeune Afrique en partenariat avec des médias allemands, son association Urgences panafricaines aurait reçu 400 000 dollars du sulfureux groupe paramilitaire russe Wagner entre 2018 et 2019.

Le Niger, nouveau laboratoire de la lutte anti-française

Avec ce poste de conseiller, Kemi Seba gagne une tribune de choix pour promouvoir son agenda panafricaniste radical. « Toute force politique qui résistera au néocolonialisme sera une force que les panafricanistes soutiendront », a-t-il affirmé sur la télévision nationale nigérienne. Un discours en phase avec celui de la junte, qui joue à fond la carte anti-française pour asseoir sa légitimité et couper les ponts avec l’ancienne puissance coloniale.

Cette nomination illustre aussi l’influence grandissante des réseaux pro-russes en Afrique francophone. Après le Mali et le Burkina Faso, le Niger pourrait devenir le nouveau laboratoire d’une « Russafrique » qui entend bousculer l’ordre post-colonial. Avec le risque d’attiser les tensions communautaires et de déstabiliser un peu plus une région sahélienne en proie aux violences djihadistes.

Pour Paris, c’est un nouveau revers dans une zone autrefois considérée comme le « pré carré » de la France. Après le retrait forcé de ses troupes du Mali et du Burkina, l’Hexagone voit un activiste qu’il a banni accéder au premier cercle du pouvoir dans un pays clé de sa stratégie au Sahel. De quoi nourrir les doutes sur l’avenir de la relation franco-africaine et les limites de la politique d’influence française sur le continent.

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