C’est un séisme qui vient de frapper le monde du conseil. McKinsey, le célèbre cabinet américain, a accepté de payer la somme astronomique de 650 millions de dollars pour échapper à un procès pénal. En cause : son implication dans la dévastatrice crise des opiacés qui a fait des ravages outre-Atlantique.
Selon les termes de l’accord, dévoilés vendredi par la justice, McKinsey sera placé sous surveillance pendant 5 longues années. Le cabinet est accusé d’avoir contribué à exacerber la crise en prodiguant des conseils douteux à des géants pharmaceutiques comme Purdue Pharma, le fabricant tristement célèbre de l’OxyContin, un antidouleur ultra-addictif.
Une Addition Salée Qui S’Alourdit
Les 650 millions ne sont que la partie émergée de l’iceberg financier auquel McKinsey doit faire face. Le document judiciaire précise en effet que le groupe a déjà déboursé près d’un milliard de dollars ces dernières années, dans le cadre de multiples accords à l’amiable :
- Plus de 640 millions versés aux 50 États américains et plusieurs territoires.
- Plus de 345 millions au civil.
- Une amende infligée par le gendarme boursier, la SEC, pour des contrôles internes défaillants.
Malgré nos sollicitations, le cabinet est resté mutique, refusant tout commentaire.
Une Coopération Tardive Mais Vitale
Si McKinsey a échappé au pire, il ne doit pas cette clémence relative à sa bonne volonté. D’après les éléments de l’accord, le groupe n’a en effet ni révélé spontanément les faits qui lui sont reprochés, ni collaboré dès le début avec les autorités.
C’est sa coopération ultérieure et les mesures prises par la suite qui lui ont permis d’éviter le procès tant redouté. Parmi ces engagements cruciaux :
- Ne plus jamais conseiller d’entreprises sur tout ce qui touche aux opiacés et autres narcotiques.
- Le licenciement de deux salariés qui avaient détruit des documents compromettants.
Des Conseils Toxiques Pour Doper Les Ventes
Les accusations portées contre McKinsey sont accablantes. Dans une plainte, l’État de New York affirmait que le cabinet avait conseillé Purdue Pharma pour l’aider à doper les ventes d’OxyContin, avec des méthodes plus que discutables :
McKinsey avait notamment recommandé à Purdue de se concentrer sur les dosages élevés, considérés comme les plus lucratifs mais aussi les plus addictifs.
C’est justement la surprescription massive de cet anti-douleur qui est considérée comme le déclencheur de la crise des opiacés. Selon les Centres de prévention et de lutte contre les maladies (CDC), ce fléau a coûté la vie à plus de 700 000 personnes entre 1999 et 2022, que ce soit par overdoses d’opiacés légaux ou illégaux.
Un Espoir De Répit Malgré L’Hécatombe
Pour la première fois depuis 2018, une lueur d’espoir point à l’horizon. En effet, le nombre de morts liées aux opiacés, en particulier au fentanyl, a légèrement reculé en 2023 (81 083 décès) par rapport à 2022 (84 181 décès).
Mais ce répit est encore bien fragile face à l’ampleur du désastre. Et les pratiques troubles de cabinets comme McKinsey, prêts à tout pour gonfler les profits de leurs clients, n’ont fait qu’attiser les braises de cette crise sanitaire et humaine sans précédent.
L’accord conclu, aussi lourd soit-il, suffira-t-il à assainir durablement ces dérives ? L’avenir nous le dira. En attendant, les familles endeuillées, elles, devront continuer à vivre avec ce fardeau. Un fardeau que tout l’argent du monde ne pourra jamais alléger.
