Gastronomie

Le Saké Japonais Inscrit au Patrimoine de l’UNESCO

Le saké et le shochu, alcools de riz emblématiques du Japon, viennent d'être inscrits au patrimoine culturel immatériel de l'UNESCO. Plongez dans l'histoire fascinante et le savoir-faire ancestral qui entourent ces breuvages, de leur rôle dans les rituels shintos jusqu'à leur rayonnement international grandissant. Kanpai !

Kanpai ! Le savoir-faire traditionnel entourant la fabrication du saké et du shochu, ces alcools de riz intimement liés à la culture et à la religion japonaises, vient d’être inscrit sur la prestigieuse liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO. Une consécration méritée pour ces breuvages millénaires, véritables piliers de l’identité nippone. Partons ensemble à la découverte de leur histoire fascinante et des secrets de leur élaboration.

Une tradition vieille de plus de 2000 ans

Si l’on en croit les historiens, les habitants de l’archipel préparaient déjà des boissons similaires au saké il y a plus de deux millénaires. Des écrits chinois datant du 3e siècle dépeignent d’ailleurs les Japonais comme un peuple friand d’alcool. À l’époque Heian (794-1185), le palais impérial s’était même doté d’un département dédié à la supervision de la production de saké et de son utilisation lors des rituels.

La technique actuelle du brassage en plusieurs étapes se serait quant à elle établie vers le milieu de l’ère Edo (1603-1868). Depuis, le processus n’a que peu évolué, perpétuant un savoir-faire ancestral transmis de génération en génération par les quelque 1400 brasseries encore en activité dans l’archipel. Des établissements que l’on retrouve même au-delà des frontières, de la France jusqu’en Nouvelle-Zélande, témoignant du rayonnement croissant de ce trésor national.

Un symbole omniprésent dans la vie des Japonais

Au Japon, le saké est bien plus qu’un simple alcool : c’est un véritable symbole culturel et spirituel. Dans le shintoïsme, religion traditionnelle de l’archipel, le riz, les gâteaux de riz et le saké constituent les principales offrandes faites aux divinités. La boisson est ainsi présente dans tous les rituels, à commencer par les cérémonies de mariage où les époux partagent une coupe de saké pour sceller leur union.

Mais le « nihonshu », comme on l’appelle au pays du Soleil-Levant, marque aussi de nombreux événements profanes : inaugurations de magasins, victoires électorales, fêtes du Nouvel An… Autant d’occasions pour les Japonais de lever leur verre en s’exclamant « Kanpai ! » et trinquer à la santé, au succès et à la prospérité.

Un processus de fabrication complexe et minutieux

Derrière la simplicité apparente du saké se cache en réalité un processus de fabrication d’une grande complexité, fruit d’un savoir-faire minutieux peaufiné au fil des siècles. Tout commence par la sélection méticuleuse du riz, dont les grains plus ronds et plus gros que ceux destinés à la consommation sont soigneusement polis afin d’en ôter les impuretés.

Après lavage et cuisson à la vapeur, les grains sont ensemencés avec du koji, une moisissure également utilisée dans la préparation du miso et de la sauce soja. Ce koji va produire les enzymes nécessaires à la transformation de l’amidon du riz en sucre. L’ajout de levure permettra ensuite d’enclencher la fermentation alcoolique au sein d’un ferment de départ appelé « moto ».

C’est là que le savoir-faire des brasseurs entre véritablement en jeu. En ajoutant progressivement du riz cuit et de l’eau au moto, ils vont déclencher et contrôler deux types de fermentations simultanées – celle de l’amidon en sucre et celle du sucre en alcool – au sein d’une même cuve. Un processus complexe et délicat, fruit d’une maîtrise acquise au fil d’innombrables essais et erreurs.

L’une des caractéristiques intéressantes de la fabrication du saké est que l’homme aide la moisissure à déclencher la fermentation, plutôt que de laisser la nature faire le travail comme pour la fabrication du vin.

Taku Takahashi, brasserie Toshimaya Shuzo à Tokyo

Une palette de saveurs et de styles

Il existe deux grandes familles de sakés : les junmai, élaborés uniquement à base de riz, et les non junmai auxquels on ajoute de l’alcool distillé. Chacune se décline ensuite en trois catégories selon le degré de polissage du riz utilisé : les sakés classiques, les ginjo et les très prestigieux dai-ginjo.

Ce polissage influe grandement sur le profil aromatique final. Plus il est poussé, plus le saké sera fruité et sec. À l’inverse, les grains moins travaillés donneront des breuvages aux saveurs de riz riches et onctueuses, à déguster de préférence à température plus élevée.

Un avenir entre tradition et renouveau

Malgré son statut d’icône culturelle, le saké doit aujourd’hui faire face à une baisse de consommation dans l’Archipel. En cause notamment, la concurrence d’autres alcools comme la bière ou le vin, l’évolution des modes de vie et un certain désintérêt des jeunes générations. En cinquante ans, les volumes ont ainsi été divisés par quatre pour tomber à 390 millions de litres en 2023.

Mais loin de sonner le glas, ce déclin relatif sur son marché domestique pourrait en réalité offrir au saké une formidable opportunité de renouveau, portée par son succès grandissant à l’international. Dopées par l’intérêt croissant des États-Unis et de la Chine pour la gastronomie et l’artisanat japonais, les exportations ont plus que doublé en une décennie, atteignant 29 millions de litres en 2023.

Cette reconnaissance par l’UNESCO vient donc couronner un savoir-faire millénaire tout en offrant au saké une vitrine mondiale inédite. L’occasion rêvée d’écrire une nouvelle page de son histoire, entre respect des traditions et innovation, pour continuer à faire rayonner l’âme de la culture japonaise aux quatre coins du globe. Kanpai !

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