En pleine campagne pour les élections législatives, le Rassemblement national (RN) a sorti l’artillerie lourde pour séduire l’électorat sur le pouvoir d’achat. Jordan Bardella, candidat au poste de Premier ministre, a proposé un drôle de « deal » aux chefs d’entreprise : une augmentation des salaires de 10% en échange d’une exonération totale des charges patronales pendant 5 ans, pour les rémunérations jusqu’à 3 fois le SMIC. Selon lui, cette mesure serait un « deal gagnant-gagnant » qui ne pèserait pas sur la compétitivité des entreprises. Mais qu’en pensent les principaux intéressés ?
Un cadeau empoisonné pour les entreprises ?
Pour beaucoup de patrons, la proposition de Jordan Bardella a tout d’un cheval de Troie. Certes, ne plus payer de charges sur les hausses de salaires peut paraître alléchant. Mais en y regardant de plus près, cette mesure cache plusieurs écueils :
- Une hausse généralisée des salaires de 10% représenterait un coût fixe très important pour les entreprises, même avec les exonérations promises. Beaucoup n’auraient pas les marges suffisantes.
- Les exonérations ne concerneraient que les 5 premières années. Et après ? Les entreprises devraient assumer seules le surcoût sur le long terme.
- Une telle hausse pourrait créer des distorsions entre les salariés juste en-dessous et au-dessus du seuil de 3 fois le SMIC.
C’est doux à entendre mais impossible à réaliser. Aucune entreprise ne peut se permettre d’augmenter tous les salaires de 10% d’un coup, même avec des exonérations temporaires.
François Asselin, président de la CPME
Des doutes sur le financement et l’efficacité
Au-delà des réticences du patronat, des économistes pointent d’autres failles dans le raisonnement du RN :
- Comment l’État compenserait-il ce manque à gagner de cotisations sociales ? Jordan Bardella reste flou sur ce point crucial.
- Une hausse uniforme de 10% ne serait pas forcément la plus efficace. Il faudrait cibler les bas salaires.
- Cette mesure ne règle pas le problème du pouvoir d’achat à long terme. Elle pourrait même l’aggraver en poussant les prix à la hausse.
Pour beaucoup d’experts, le « deal » du RN ressemble plus à une fausse bonne idée qu’à une vraie solution pérenne pour redonner du pouvoir d’achat aux Français. Il faudrait agir sur d’autres leviers comme la fiscalité, la formation ou encore les prix de l’énergie.
Une proposition peu crédible pour le patronat
Malgré ses efforts pour rassurer le monde économique, le RN peine toujours à convaincre les chefs d’entreprise avec son programme. Cette nouvelle proposition sur les salaires ne devrait pas inverser la tendance.
Le RN essaye de se donner une image pro-business mais ses mesures restent trop floues et potentiellement contre-productives. Le patronat n’est pas dupe.
Un proche du Medef
Alors que la campagne des législatives bat son plein, le RN va devoir muscler son argumentaire économique s’il veut vraiment percer dans l’électorat entrepreneurial. Son « deal » sur les salaires ne suffira pas à faire oublier les réserves persistantes des milieux d’affaires à son égard.