Au lendemain de l’entrée en vigueur du cessez-le-feu entre le Hamas et Israël, les habitants de Gaza se réveillent avec l’espoir de pouvoir enfin regarder vers l’avenir. Après plus d’un an de bombardements incessants qui ont dévasté le territoire, ce premier matin de trêve offre aux Gazaouis un répit inespéré, bien que teinté d’incertitude.
Une nuit paisible, un sentiment oublié
Pour beaucoup, cette nuit sans le fracas des bombes est une première depuis de longs mois. Ammar Barbakh, 35 ans, peine encore à y croire. Réfugié sous une tente dressée devant les ruines de sa maison à Khan Younès, au sud de la bande de Gaza, il savoure ce moment de quiétude retrouvée.
Nous n’avions pas peur en nous demandant quand serait la prochaine frappe. C’est la première fois que je dors paisiblement depuis fin novembre 2023. C’est un sentiment vraiment incroyable.
Ammar Barbakh, habitant de Khan Younès
Comme lui, de nombreux Gazaouis évoquent une renaissance, égrainant les étapes d’un retour à la vie dont chacun espère qu’il va durer. Après plus de 15 mois d’une guerre dévastatrice déclenchée par l’attaque du Hamas en territoire israélien le 7 octobre 2023, cette trêve représente un espoir fragile mais intense.
Un paysage de désolation
Mais le chemin vers la reconstruction s’annonce long et ardu. Déjà rongée par la pauvreté et le chômage avant le conflit, notamment en raison du blocus israélien imposé depuis plus de 15 ans, Gaza offre aujourd’hui un spectacle effroyable. Selon les Nations unies, plus de 60% de la surface bâtie a été détruite par les bombardements.
Des immeubles éventrés se dressent encore ça et là, mais ailleurs, seuls subsistent des amas de décombres à peine séparés par ce qui fut autrefois des rues animées. La quasi-totalité des habitants ont dû fuir leurs logements, se réfugiant sous des tentes de fortune ou dans des bâtiments publics transformés en abris de fortune.
Un retour au foyer, entre joie et tristesse
Dès l’annonce de la trêve, des milliers de Gazaouis se sont mis en route pour regagner ce qu’il reste de leurs foyers. Dans plusieurs quartiers de Gaza-ville, on a pu voir des colonnes de personnes avançant parmi les gravats, certains s’activant déjà pour redonner vie à un bout de mur encore debout.
Il y a à la fois de la joie et de la tristesse. Je suis heureux de ce répit mais dévasté d’avoir perdu 32 membres de ma famille au cours de cette guerre.
Samer Daloul, habitant du quartier d’al-Zeitoun à Gaza-ville
Même s’il n’a pas encore regagné son logis, Samer Daloul voit ses voisins s’affairer autour de l’école où il a trouvé refuge avec 12 membres de sa famille, dont 5 enfants. Certains repeignent un pan de mur rescapé, beaucoup fouillent les décombres à la recherche de ce qui peut être sauvé, d’autres tentent de retrouver des proches disparus. L’heure est à la reconstruction, il n’y a pas d’alternative.
L’espoir d’une paix durable
À Rafah, au sud du territoire, Naha Abed a eu la chance de trouver une pièce encore habitable dans son ancienne maison. Après 10 mois passés sous une tente à Deir el-Balah, dans des conditions humanitaires dramatiques, cette mère de 28 ans a savouré avec son mari et ses trois filles un « sommeil paisible » pour la première fois depuis bien longtemps.
Nous avons tout perdu, mais le plus important c’est que la guerre ne reprenne pas.
Naha Abed, habitante de Rafah
Au-delà des défis immenses de la reconstruction, de l’accès à la nourriture, à l’eau et à l’électricité, c’est cet espoir d’une paix enfin durable qui anime aujourd’hui les Gazaouis. Après tant de souffrances et de destructions, chacun aspire à pouvoir se projeter dans l’avenir sans la peur au ventre, à offrir un avenir meilleur à ses enfants.
Mais dans ce territoire meurtri, où les plaies des conflits passés sont encore vives, la prudence reste de mise. Si le cessez-le-feu apporte un répit bienvenu et nécessaire, beaucoup craignent qu’il ne soit qu’une accalmie temporaire dans un cycle de violences qui n’en finit pas. L’espoir d’une paix durable reste fragile, mais il est aujourd’hui le bien le plus précieux des habitants de Gaza.