Le procès retentissant des viols en série sous emprise chimique dans le sud-est de la France arrive à son terme. Après plus de deux semaines consacrées à la défense des 51 hommes accusés d’avoir violé Gisèle Pelicot, 72 ans, les plaidoiries se sont achevées ce vendredi en désignant une fois de plus le « monstre » Dominique Pelicot comme le véritable coupable.
L’ex-mari de la victime a avoué l’avoir droguée pour ensuite la violer et la livrer à des dizaines d’inconnus recrutés sur internet. Selon les avocats de la défense, leurs clients seraient en réalité des « victimes indirectes », manipulées par cet homme décrit tour à tour comme un « loup », un « ogre » ou encore un « violeur en série » à la « psychologie de manipulateur ».
Des accusés présentés comme des « victimes indirectes »
Me Nadia El Bouroumi, l’une des dernières avocates à prendre la parole, a défendu ses clients en soulignant leurs vies « simples et tranquilles » jusqu’à leur rencontre avec Dominique Pelicot. Selon elle, ils n’avaient « aucunement conscience » qu’ils agressaient sexuellement Gisèle Pelicot.
Je défends des hommes qui sont la normalité de cette société et M. Pelicot, c’est l’exception, c’est quelqu’un de dangereux. On a un monstre dans le box.
Me Nadia El Bouroumi
L’avocate a martelé que Dominique Pelicot avait « utilisé ces hommes comme des objets » pour « assouvir ses fantasmes », faisant d’eux des « victimes indirectes ». Elle a rappelé la puissance de manipulation de cet homme, capable selon elle de faire dire à son ex-femme qu’il était « un chic type » lors de son audition par les policiers en 2020.
Un « violeur en série » accusé de manipulation depuis « plus de 30 ans »
Me El Bouroumi a également fait référence à deux autres dossiers dans lesquels Dominique Pelicot est mis en cause : un meurtre avec viol à Paris en 1991, qu’il nie, et une tentative de viol en région parisienne en 1999, qu’il reconnaît. Pour l’avocate, cela prouve que l’accusé « manipule » ses victimes depuis « plus de 30 ans ».
Il n’y a pas de crime sans intention : l’intention c’est quoi ? C’est la volonté et la conscience de commettre un crime.
Me Nadia El Bouroumi
Sur ce fondement, la défense a demandé l’acquittement des accusés, arguant qu’ils n’avaient pas l’intention de commettre un viol. Une ligne suivie par la plupart des avocats durant ce procès, qui ont tenté de dédouaner leurs clients pour mieux accabler Dominique Pelicot.
Une défense sous « pression » face à une « icône »
Certains avocats ont souligné les difficultés rencontrées par la défense dans ce procès très médiatisé, avec 166 médias accrédités dont 76 étrangers. Me El Bouroumi a ainsi déclaré qu’il était « très dur » pour les avocats de s’exprimer car ils font face à « une partie civile qui est une icône » et que « toute parole est une atteinte à la femme ».
Elle a appelé la cour à « garder la tête froide » et à « revenir aux fondamentaux » lors du délibéré, malgré la « pression du public » et des médias. Un appel pour une décision qui ne serait pas influencée par le contexte très particulier de ce procès hors norme.
Derniers mots des accusés avant le verdict très attendu
Lundi, Dominique Pelicot et ses coaccusés auront une dernière occasion de s’exprimer avant que la cour ne se retire pour délibérer. L’accusation a requis des peines allant de quatre à vingt ans de réclusion criminelle, et demandé à la cour d’envoyer un « message d’espoir aux victimes de violences sexuelles ».
Vous signifierez que le viol ordinaire n’existe pas, que le viol accidentel ou involontaire n’existe pas.
Laure Chabaud, représentante du ministère public
Le verdict de ce procès qui a suscité une immense émotion est attendu jeudi. Il sera scruté pour le message qu’il enverra sur la question du consentement et la responsabilité des auteurs de violences sexuelles. Un jugement qui pourrait faire date dans un contexte de libération de la parole des victimes et de durcissement de la réponse pénale.