La France est secouée par un procès d’une ampleur sans précédent. Dominique Pelicot, un homme ordinaire, est accusé d’avoir orchestré un réseau de viols en série pendant plus d’une décennie. Au cœur de cette affaire sordide, son ex-épouse Gisèle, droguée à son insu et livrée inconsciente à des dizaines d’hommes recrutés sur internet. Alors que l’opinion publique gronde et que les militantes féministes réclament justice, les avocats des 50 coaccusés tentent tant bien que mal de faire entendre leur voix dans cette « tornade » médiatique et sociétale.
Une Défense Sous Pression
Face à l’horreur des faits reprochés et à la pression de l’opinion publique, la tâche des avocats de la défense s’annonce ardue. Comme le souligne Me Raje Yassine-Dbiza, avocate d’un des coaccusés, il est « difficile de s’opposer à la pression de l’opinion publique ». Et pour cause, leurs clients se font « cracher dessus » dès qu’ils se rendent au tribunal. Pourtant, beaucoup assurent avoir été piégés, manipulés par Dominique Pelicot qui les aurait fait croire qu’ils participaient aux jeux d’un couple libertin consentant.
Le « Jeu De Piste » De Dominique Pelicot
Me Fanny Pierre, qui défend Quentin H., un gardien de prison de 34 ans venu une seule fois chez les Pelicot, a décrit le « conditionnement » exercé par Dominique Pelicot. Une sorte de « jeu de piste » qui aurait mené son client du parking du village jusqu’à la chambre conjugale, le piégeant et retardant sa prise de conscience. « Il ne conteste pas, il aurait dû partir, mais il devrait être condamné à une juste peine », a-t-elle plaidé, jugeant excessives les 11 années de prison requises par l’accusation.
Au-Delà D’Un Procès, Un Débat De Société
Mais pour beaucoup, ce procès dépasse le simple cadre judiciaire. Il est le révélateur d’une société malade, gangrenée par les violences faites aux femmes. L’accusation a d’ailleurs appelé la cour à envoyer « un message d’espoir » à travers son verdict, à signifier « aux femmes de ce pays qu’il n’y a pas de fatalité à subir, et aux hommes pas de fatalité à agir ». Un appel qui n’a pas manqué de faire réagir certains avocats de la défense, à l’instar de Me Olivier Lantelme qui a reproché au parquet de vouloir faire de ce procès une tribune.
Sauf à donner bonne conscience à une société bien malade, [mon client] mérite de repartir libre
Me Olivier Lantelme, avocat d’un des coaccusés
L’Ombre De Dominique Pelicot
Car pour la défense, le véritable responsable de cette affaire n’est autre que Dominique Pelicot lui-même. Décrit comme « machiavélique » par Me Lantelme, il « trône en maître absolu et contemple son œuvre depuis le box des accusés ». Contre lui, l’accusation a requis la peine maximale de 20 ans de réclusion criminelle. Une peine à la hauteur de l’horreur de ses actes mais qui ne suffira pas, selon certains avocats, à « enrayer un monde où les violences faites aux femmes sont endémiques ».
Un Verdict Très Attendu
Le verdict de ce procès hors-norme est attendu pour la fin du mois de décembre. Au-delà du sort individuel des accusés, beaucoup espèrent qu’il enverra un signal fort à la société tout entière. Un signal pour dire stop aux violences sexuelles, stop à la « culture du viol ». Mais certains, à l’instar de Me Lantelme, mettent en garde contre la tentation de faire de ce procès un symbole au détriment de la justice :
Que ceux qui rêvent de 20 ans aillent vivre du côté de Moscou, en Iran ou en Corée-du-Nord. Respectez ce que nous sommes, des humanistes.
Me Olivier Lantelme, avocat d’un des coaccusés
Une chose est sûre, ce procès aura marqué les esprits et fait bouger les lignes. Reste à savoir si la société française est prête à se remettre en question en profondeur et à engager le combat de longue haleine contre les violences sexistes et sexuelles. Le chemin sera long mais ce procès pourrait bien être un premier pas important.