Dans un discours musclé, le président chinois Xi Jinping a sommé l’armée de mener une lutte implacable contre la corruption dans ses rangs. S’adressant mercredi aux soldats de la force de soutien à l’information, il a martelé que les troupes devaient « combattre la corruption » et se concentrer sur leur aptitude à « gagner des guerres ». Des propos rapportés par les médias d’État alors que Pékin intensifie sa répression anticorruption au sein des forces armées.
Une purge anticorruption d’ampleur dans l’armée
Depuis son arrivée au pouvoir il y a plus de dix ans, Xi Jinping a orchestré une vaste campagne anti-corruption visant les fonctionnaires, dont les détracteurs affirment qu’elle sert aussi à éliminer ses rivaux politiques. Ces efforts semblent désormais se concentrer sur l’armée chinoise. Selon des sources proches du dossier, le haut gradé Miao Hua a rejoint le mois dernier une série de personnalités de haut rang écartées en un peu plus d’un an.
Dans son allocution aux troupes de la force de soutien à l’information, unité chargée des opérations cyber, Xi a insisté sur la nécessité d' »appliquer rigoureusement la discipline ». Il a exhorté l’armée à « lutter contre la corruption pour garantir la loyauté, la pureté et la fiabilité absolues de la force ».
Modernisation et réforme de l’armée
La création de la force de soutien à l’information, annoncée en avril, s’inscrit dans le cadre d’une réforme plus large de la gestion par l’armée chinoise de ses opérations dans les domaines du cyberespace, du renseignement, de la logistique et de l’espace. Xi Jinping a souligné mercredi que les troupes devaient « se concentrer sur les capacités à combattre et à gagner des guerres ».
Des tensions régionales exacerbées
Ce message intervient alors que plusieurs points chauds de la région se sont enflammés cette semaine, notamment autour de Taïwan, que Pékin considère comme une partie de son territoire et n’exclut pas de récupérer par la force. La visite dans le Pacifique du président taïwanais Lai Ching-te, et son passage par Hawaï et Guam, territoires américains, a suscité l’ire de la Chine.
Les États-Unis doivent « reconnaître clairement le grave danger que les actes séparatistes d’indépendance de Taïwan représentent pour la paix et la sécurité dans le détroit de Taïwan »
Avertissement de Pékin aux États-Unis
De leur côté, les Philippines ont accusé mercredi les garde-côtes chinois d’avoir tiré des coups de canon à eau et « heurté » un navire gouvernemental en mer de Chine méridionale, autre zone de tensions.
Une armée sous haute surveillance
Dans ce contexte géopolitique tendu, Xi Jinping semble déterminé à avoir une armée irréprochable et totalement fidèle. La purge anticorruption en cours vise à éliminer tout élément suspect ou potentiellement déloyal au sein des forces. Selon des analystes, elle permet aussi au président chinois de consolider son emprise sur l’institution militaire.
Mais cette campagne pourrait aussi avoir des effets délétères, en instillant un climat de méfiance et en perturbant le fonctionnement de la chaîne de commandement. Certains officiers hésiteraient à prendre des initiatives de peur d’être accusés de corruption.
L’armée chinoise est soumise à une pression inédite. Entre les directives de Xi Jinping, les tensions externes et maintenant cette purge interne, les militaires marchent sur des œufs.
Un expert des questions de défense souhaitant rester anonyme
Quelle armée chinoise pour demain ?
Au-delà de la lutte contre la corruption, la grande question est de savoir quel visage aura l’armée chinoise au sortir de ce processus. Xi Jinping semble miser sur une force totalement acquise à sa cause, prête au combat et apte à défendre les intérêts de la Chine dans son environnement régional immédiat comme sur la scène mondiale.
Mais le chemin est encore long et semé d’embûches. La modernisation et la professionnalisation de l’Armée populaire de libération restent des chantiers d’ampleur. Et la multiplication des foyers de tensions aux frontières de la Chine met à rude épreuve les capacités et la réactivité des forces armées.
Une chose est sûre : avec une armée recentrée sur son cœur de mission et purgée de ses éléments les moins fiables, Xi Jinping disposera d’un outil redoutable pour affirmer la puissance chinoise et défendre ce qu’il estime être les intérêts fondamentaux de son pays. De quoi inquiéter nombre de capitales dans la région et au-delà.
