En pleine tournée dans le Pacifique, le président taïwanais Lai Ching-te a entamé dimanche sa deuxième journée de visite dans l’archipel américain d’Hawaï. Une escale qui suscite la colère de Pékin, alors que les États-Unis viennent d’approuver un nouveau contrat de livraison d’armes à Taïwan.
Une « nouvelle ère démocratique » selon Taïwan, une provocation pour la Chine
Il s’agit de la première étape de la tournée du dirigeant taïwanais dans plusieurs territoires du Pacifique, un voyage qu’il présente comme l’entrée dans une « nouvelle ère démocratique ». Mais cette initiative est loin de plaire à la Chine, qui considère Taïwan comme une province rebelle.
D’après une source proche du dossier, la Chine estime que Taïwan est l’une de ses provinces, qu’elle n’a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. Elle n’exclut pas le recours à la force pour y parvenir.
Le président Lai multiplie les discours à Hawaï
Au deuxième jour de son déplacement à Hawaï, Lai Ching-te a prononcé un nouveau discours, cette fois à l’East-West Center d’Honolulu, après une première allocution publique samedi. Selon la porte-parole de la présidence taïwanaise Karen Kuo, M. Lai a notamment évoqué dimanche la collaboration entre Taïwan et les États-Unis, soulignant l’engagement de Taïwan en faveur de sa propre sécurité et l’engagement commun de Taïwan et des États-Unis en faveur de la paix régionale.
Lors de sa première prise de parole samedi, le président taïwanais avait martelé la nécessité de « lutter ensemble pour éviter la guerre », avertissant qu’il n’y avait « aucun gagnant » dans un conflit.
Un entretien avec Nancy Pelosi qui ravive les tensions
Dimanche, le président taïwanais s’est par ailleurs entretenu environ 20 minutes par téléphone avec l’ancienne présidente de la Chambre américaine des représentants Nancy Pelosi. Un échange qui n’est pas anodin quand on connaît les vives réactions qu’avait suscitées la visite de Mme Pelosi à Taïwan en août 2022, alors qu’elle était en poste.
M. Lai et Mme Pelosi ont notamment « échangé leurs points de vue sur l’industrie des semi-conducteurs, l’intelligence artificielle et les menaces militaires de la Chine à l’encontre de Taïwan ».
Karen Kuo, porte-parole de la présidence taïwanaise
En réponse à la visite de Nancy Pelosi l’an dernier, Pékin avait déclenché des exercices militaires massifs, lors desquels des missiles avaient survolé Taïwan. Un avertissement on ne peut plus clair sur la détermination de la Chine à défendre ce qu’elle considère comme son intégrité territoriale.
La suite de la tournée du président taïwanais dans le Pacifique
Après Hawaï, le président Lai Ching-te poursuivra sa tournée dans le Pacifique en visitant les îles Marshall, Tuvalu et Palaos, seules nations de la région parmi les 12 alliés restants à reconnaître Taïwan. Il devrait par ailleurs s’arrêter une nuit sur l’île de Guam, territoire non incorporé et organisé des États-Unis.
La Chine condamne fermement la tournée du dirigeant taïwanais
Opposé à toute initiative donnant aux autorités taïwanaises une légitimité internationale, Pékin a fermement condamné la tournée du dirigeant taïwanais. « La Chine condamne fermement l’organisation par les États-Unis du +transit+ de Lai Ching-te et a adressé des protestations solennelles auprès des États-Unis », a indiqué un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères dans un communiqué.
Pékin a par ailleurs exprimé sa « ferme opposition » et « déploré » l’approbation par les États-Unis d’un nouveau projet de vente d’armes à Taïwan, à hauteur de 385 millions de dollars (364 millions d’euros). « Nous exhortons les États-Unis à cesser immédiatement d’armer Taïwan et de cesser d’encourager et de cautionner les forces qui cherchent à obtenir l’indépendance de Taïwan et veulent renforcer leur armée pour y parvenir », a déclaré la diplomatie chinoise.
Les relations complexes entre Taïwan, la Chine et les États-Unis
Washington n’entretient pas de relations diplomatiques officielles avec Taipei mais reste le principal bailleur de fonds de l’île et son plus grand fournisseur d’armes. Une situation qui irrite profondément Pékin, qui y voit une ingérence dans ses affaires intérieures.
Les relations entre Pékin et Taipei sont exécrables depuis 2016 et l’arrivée à la présidence taïwanaise de Tsai Ing-wen, puis de Lai Ching-te en 2024. La Chine les accuse régulièrement de vouloir creuser la séparation culturelle entre l’île et le continent. En réponse, Pékin a notamment renforcé son activité militaire autour de Taïwan ces dernières années.
La visite du président taïwanais Lai Ching-te à Hawaï et sa tournée dans le Pacifique risquent donc d’envenimer encore davantage les relations déjà tendues entre Taïwan et la Chine. Une situation géopolitique explosive, sur fond de rivalité sino-américaine, qu’il faudra suivre de près dans les semaines et mois à venir.