La présidence de Yoon Suk Yeol en Corée du Sud traverse une zone de fortes turbulences. Élu en 2022 avec la marge la plus étroite de l’histoire du pays, le chef de l’État conservateur de 63 ans enchaîne depuis les crises politiques et les scandales familiaux. Un parcours chaotique qui a mené mardi à une tentative avortée d’imposer la loi martiale, précipitant le pays dans une crise institutionnelle majeure. Retour sur les événements marquants d’un mandat sous haute tension.
Un président contesté dès son élection
L’arrivée au pouvoir de Yoon Suk Yeol en 2022 ne s’est pas faite sous les meilleurs auspices. Élu avec une marge infime face au candidat du Parti démocrate, le président conservateur n’a jamais disposé de la majorité à l’Assemblée nationale. Une situation de cohabitation qui a rapidement dégénéré en bras de fer entre l’exécutif et le Parlement.
La popularité déjà fragile de Yoon Suk Yeol s’est encore effritée en 2024 lorsque son parti, le Parti du pouvoir au peuple (PPP), a subi une cuisante défaite aux élections législatives. Avec seulement 108 députés sur 300, contre 192 pour l’opposition démocrate, sa formation est sortie très affaiblie du scrutin. Conséquence directe : le pays se retrouve sans budget validé pour l’année 2025, paralysant l’action gouvernementale.
Séoul endeuillée, le président pointé du doigt
Outre ces revers politiques, la gestion de plusieurs drames a également terni l’image présidentielle. En octobre 2022, une bousculade géante lors des festivités d’Halloween à Séoul fait plus de 150 morts, plongeant le pays dans le deuil. La tragédie est rapidement imputée à une cascade de négligences des autorités, et en premier lieu du gouvernement de Yoon Suk Yeol.
Les critiques pleuvent aussi sur la gestion de l’inflation galopante des produits alimentaires, la dégradation de la situation économique et les atteintes croissantes à la liberté d’expression. Des sujets explosifs qui crispent l’opinion publique et alimentent un climat social tendu.
Des proches dans la tourmente judiciaire
Pour ne rien arranger, le président conservateur doit aussi gérer les casseroles judiciaires de ses proches. L’année dernière, sa femme Kim Keon Hee a défrayé la chronique en étant filmée à son insu en train d’accepter un sac à main de luxe d’une valeur de 2 000 dollars. Une « affaire du sac » qui s’ajoute aux soupçons de manipulation de cours boursiers dans lesquels la première dame est citée.
Autre affaire embarrassante : la condamnation à un an de prison de la belle-mère du président pour falsification de documents financiers. Choi Eun-soon, qui a purgé sa peine, n’a été libérée qu’en mai 2024. Une cascade de scandales qui écornent sérieusement la stature présidentielle.
La loi martiale ou le chant du cygne
Acculé de toutes parts, Yoon Suk Yeol tente un coup de force mardi soir en apparaissant à la télévision pour annoncer la mise en place immédiate de la loi martiale. Prétextant une menace des « forces communistes nord-coréennes », le président dit vouloir ainsi « protéger la Corée du Sud libérale » et « éliminer les éléments hostiles à l’État ».
Une décision aussi soudaine que radicale, qui place le pays au bord du chaos politique. Dès le lendemain, le chef de l’État est conspué de toutes parts. Sa popularité s’effondre à 13% selon un sondage, l’opposition réclame sa destitution, et même son propre camp le lâche en le qualifiant de « danger pour le pays ».
Face au tollé, Yoon Suk Yeol est contraint dès samedi de présenter des « excuses sincères » aux Sud-Coréens via un message télévisé, sans pour autant démissionner. Une volte-face qui ne calme en rien la colère de la rue et de la classe politique. Le Parlement pourrait voter dès cette fin de semaine la destitution du chef de l’État, qui est également visé par une enquête pour « rébellion ».
Après seulement deux ans à la tête du pays, la chute de celui qui fut un procureur réputé et un pourfendeur de la corruption semble se précipiter. Entre scandales à répétition et tentative désespérée de s’accrocher au pouvoir, Yoon Suk Yeol aura marqué de son empreinte les heures sombres de la jeune démocratie sud-coréenne. Les prochains jours s’annoncent décisifs pour l’avenir politique du président conservateur, qui joue désormais sa survie.