Seize jours après le passage dévastateur du cyclone Chido sur Mayotte, archipel français de l’Océan Indien, le nouveau Premier ministre François Bayrou s’est envolé ce dimanche avec une délégation ministérielle et 2,5 tonnes de matériel humanitaire pour venir en aide à la population sinistrée. Avec 39 morts et plus de 4000 blessés recensés, Chido est considéré comme le cyclone le plus meurtrier à frapper Mayotte depuis 90 ans. Les Mahorais attendent désespérément le rétablissement des services essentiels comme l’eau et l’électricité.
D’après une source proche du dossier, l’avion gouvernemental transporte dans ses soutes des pastilles de purification d’eau, du matériel de soins et d’équipement pour les patients sous dialyse, de quoi répondre aux besoins sanitaires les plus urgents. L’équipe ministérielle de 5 membres, conduite par François Bayrou en personne, est attendue à l’aéroport de Mamoudzou, la capitale, vers 6h du matin heure locale.
Une Mobilisation Générale pour Déblayer et Reconstruire
En amont de cette visite officielle très attendue, près de 200 agents et une centaine d’entreprises étaient déjà à pied d’œuvre tout le week-end pour mener une vaste opération de déblaiement des rues de Mamoudzou, jonchées de gravats et de débris charriés par les pluies diluviennes et les vents violents de Chido.
Au-delà de la gestion des urgences, le gouvernement se projette sur le titanesque chantier de la reconstruction. Le Premier ministre a fixé un objectif ambitieux de 2 ans pour rebâtir Mayotte. Son ministre des Outre-Mer Manuel Valls a, de son côté, martelé l’engagement de l’État à reconstruire l’île « mieux et différemment » lors de sa prise de fonction.
Des Promesses à Tenir
Mais pour la population mahoraise durement éprouvée, la confiance ne se décrète pas, elle se gagne sur le terrain. Lors de sa visite express les 19 et 20 décembre, le président Emmanuel Macron a été vivement interpelé par des sinistrés exaspérés par le manque de réactivité des autorités et inquiets pour leur avenir.
On veut du concret, des actes, pas des belles paroles !
Un habitant de Mamoudzou à Emmanuel Macron le 20 décembre
Le chef de l’État a promis une loi spéciale pour « rebâtir Mayotte » et « mettre fin » aux bidonvilles. Selon nos informations, ce texte, qui reprendrait des dispositions d’un projet de loi déjà en gestation, pourrait être présenté dès le 3 janvier, lors du premier Conseil des ministres du gouvernement Bayrou.
Des Aides Concrètes Très Attendues
Mais pour la majorité des 270 000 habitants de cet archipel, le 101ème département français et le plus pauvre, l’urgence est ailleurs. Il faut d’abord panser les plaies, reloger les milliers de sans-abris, et surtout leur donner les moyens de reprendre une activité.
Chido a ravagé une économie déjà fragile, très dépendante des transferts financiers de la métropole. Selon la Chambre de Commerce et d’Industrie, 60% des entreprises ont subi des dégâts et 80% des exploitations agricoles sont touchées. Le secteur vital de la pêche est quasiment à l’arrêt, avec des infrastructures portuaires endommagées et des bateaux détruits.
Autant de sujets brûlants sur la table des discussions entre le Premier ministre et les acteurs locaux ce lundi. Des annonces concrètes sont espérées sur le déblocage rapide des indemnisations des assurances, des prêts à taux zéro, voire un moratoire sur le remboursement des emprunts des entreprises et des ménages.
Le Spectre du Syndrome de l’Ultra-Marin
Pour éviter l’écueil d’une reconstruction hors-sol, pilotée depuis Paris, de nombreuses voix plaident pour une implication étroite des forces vives locales. À commencer par les maires, en première ligne face aux administrés, mais aussi la société civile organisée en associations et les chefs d’entreprises, qui ont une connaissance fine du territoire et de ses besoins.
Autre priorité, lutter contre le risque de voir certains quartiers populaires plonger dans l’assistanat et l’errance, voire la délinquance, sur fond de promesses non tenues. Un syndrome tristement récurrent dans l’histoire agitée des relations entre la France et ses outre-mer, de la Réunion aux Antilles.
Preuve de la défiance ambiante, des manifestations émaillées d’incidents ont eu lieu à Mamoudzou ce week-end pour réclamer la démission des élus accusés « d’incompétence » dans la gestion de crise. Un avant-goût de la forte pression populaire qui attend le Premier ministre pour son baptême du feu ultramarin.
L’enjeu est donc double pour François Bayrou et son gouvernement : répondre efficacement à l’urgence humanitaire pour apaiser la colère, tout en posant les jalons d’un véritable plan Marshall pour bâtir un nouveau modèle de développement pour Mayotte. Un défi immense qui engage la crédibilité de l’État dans ce confetti de République oublié, à 8000 kilomètres de Paris.
