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Le Parlement Européen Exige de Nouvelles Élections en Géorgie

Le Parlement européen condamne fermement les élections géorgiennes d'octobre entachées de graves irrégularités. Il exige leur réorganisation rapide et menace de sanctions les dirigeants du pays, sur fond d'inquiétudes d'une dérive autoritaire prorusse en Géorgie...

Une grave crise politique secoue actuellement la Géorgie suite aux élections législatives très controversées du 26 octobre dernier. Le Parlement européen vient d’adopter à une large majorité une résolution condamnant fermement la tenue de ce scrutin, qui selon lui « ne respectait pas les normes internationales ». Les eurodéputés réclament ni plus ni moins que ces élections soient purement et simplement « réorganisées dans un délai d’un an ».

De multiples et graves irrégularités dénoncées

Dans le texte approuvé par 444 voix contre seulement 72, le Parlement européen s’alarme des « nombreuses et sérieuses violations électorales » rapportées par les observateurs lors de ce scrutin. Des cas avérés « d’intimidations, de manipulations des votes et même de bourrages d’urnes » sont pointés du doigt. Face à l’ampleur des fraudes, les eurodéputés disent rejeter « toute reconnaissance des résultats » de ces élections.

Le parti du Rêve géorgien, qui domine la vie politique du pays depuis 2012 et que ses opposants accusent de dérive autoritaire prorusse, est sorti vainqueur de ce scrutin très contesté. Mais pour le Parlement européen, il porte l’entière responsabilité de ce qu’il qualifie de « manifestation du recul démocratique continu » de la Géorgie ces dernières années.

L’UE brandit la menace de sanctions contre les dirigeants géorgiens

Au-delà de la condamnation des élections, la résolution adoptée jeudi par les eurodéputés appelle l’Union européenne à envisager des « sanctions personnelles » visant directement plusieurs hauts responsables géorgiens. Sont nommément cités le Premier ministre Irakli Kobakhidzé, le maire de Tbilissi et secrétaire général du parti au pouvoir Kakha Kaladzé, ainsi que la présidente du Parlement géorgien Shalva Papuashvili.

À l’inverse, le Parlement européen dit soutenir la présidente géorgienne Salomé Zourabichvili, saluant les mesures prises par cette dernière « pour ramener le pays sur la voie démocratique ». Mme Zourabichvili a en effet saisi la Cour constitutionnelle pour tenter de faire annuler les résultats des élections très décriées du 26 octobre, posture qui lui vaut l’hostilité du gouvernement.

Les eurodéputés demandent aussi la libération de Saakachvili

Dans leur résolution, les élus européens réclament par ailleurs « la libération immédiate pour des raisons humanitaires » de l’ancien président géorgien pro-occidental Mikheil Saakachvili, aujourd’hui emprisonné dans des conditions très difficiles. Ce dernier, qui avait accédé au pouvoir par la « révolution des roses » en 2003, est devenu l’ennemi juré du parti au pouvoir depuis sa défaite électorale en 2012.

Malgré les protestations de l’opposition réclamant l’annulation du scrutin et de multiples manifestations, le nouveau Parlement géorgien issu des élections contestées a tenu sa première session cette semaine. Il a fixé au 14 décembre la date du prochain scrutin présidentiel, qui se tiendra au suffrage indirect. Un passage en force qui risque d’attiser encore davantage les tensions dans le pays.

Suspension du processus d’intégration à l’UE de la Géorgie

La résolution du Parlement européen s’inscrit dans un contexte de dégradation des relations entre l’Union européenne et la Géorgie ces derniers mois. Ce pays du Caucase du Sud avait pourtant obtenu en décembre 2023 le statut très convoité de pays candidat à l’adhésion à l’UE.

Mais depuis, la Commission européenne a décidé de suspendre le processus d’intégration. En cause : l’adoption par le gouvernement géorgien de plusieurs textes de loi inspirés de la législation russe et portant notamment sur les « valeurs familiales traditionnelles » ou « l’influence étrangère ». Des initiatives qui suscitent l’inquiétude de l’UE quant à la trajectoire démocratique du pays.

Cette élection s’est tenue dans un climat de peur, avec un niveau choquant d’intimidation des électeurs, notamment dans les circonscriptions peuplées par les minorités ethniques.

Michael Gahler, eurodéputé allemand, rapporteur sur la Géorgie

C’est dans ce contexte tendu que s’est tenue fin octobre la visite très critiquée du Premier ministre hongrois Viktor Orban à Tbilissi. Les eurodéputés condamnent ce déplacement, estimant qu’il constitue « une violation des positions de l’UE ». Ils soulignent que M. Orban n’était en aucun cas mandaté pour s’exprimer « au nom des 27 » en Géorgie.

La résolution adoptée jeudi par le Parlement européen constitue une prise de position très ferme face à ce qu’il considère comme une dérive autoritaire très préoccupante en Géorgie. Reste à voir si le gouvernement géorgien acceptera d’organiser de nouvelles élections comme le réclament les eurodéputés. À ce stade, cela semble cependant très incertain.

Ce différend croissant avec l’UE pourrait durablement compromettre les efforts d’intégration européenne de ce pays, partenaire stratégique aux marches orientales de l’Europe. Une nouvelle illustration des crispations géopolitiques à l’œuvre dans cette région à l’influence disputée entre l’Occident et la Russie.

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