En dépit des vives protestations de la diplomatie israélienne, le Pape François a réitéré dimanche sa condamnation de la « cruauté » des frappes menées par Israël contre la bande de Gaza. Un plaidoyer poignant qui intervient alors que le bilan humain ne cesse de s’alourdir dans l’enclave palestinienne.
Le Pape persiste et signe malgré les critiques d’Israël
Pour la deuxième fois en deux jours, le souverain pontife a exprimé publiquement sa douleur face à la situation à Gaza. Lors de la prière de l’Angélus ce dimanche, il a une nouvelle fois dénoncé avec force « la cruauté » et « tant de cruauté » dont sont victimes les Gazaouis, en particulier les enfants « mitraillés » et les « bombardements d’écoles et d’hôpitaux ».
Une prise de position sans détour qui fait écho à ses propos de samedi, lorsqu’il avait déjà qualifié de « cruauté » la mort de sept enfants d’une même famille dans un bombardement israélien. Des paroles qui avaient alors suscité l’ire d’Israël.
Hier (vendredi), des enfants ont été bombardés. C’est de la cruauté, ce n’est pas la guerre. Je tiens à le dire parce que cela me touche au coeur.
– Le Pape François, s’adressant samedi aux membres du gouvernement du Vatican
Face à ces propos, le ministère israélien des Affaires étrangères n’a pas tardé à réagir, dénonçant des « remarques particulièrement décevantes car déconnectées du contexte réel et factuel de la lutte d’Israël contre le terrorisme jihadiste ». La diplomatie israélienne appelle à cesser « le deux poids, deux mesures et la mise à l’index d’Israël », estimant que « la cruauté, ce sont les terroristes qui se cachent derrière des enfants tout en essayant d’assassiner des enfants israéliens ».
Le lourd tribut de la guerre à Gaza
Le ton accusateur et les chiffres avancés par Israël peinent cependant à masquer l’ampleur du déséquilibre des pertes dans ce conflit. Depuis le début de la guerre le 7 octobre 2023, déclenchée par une attaque sans précédent du Hamas contre Israël :
- 1 208 Israéliens ont perdu la vie, en majorité des civils, selon un bilan officiel compilé par l’AFP.
- Plus de 45 000 Palestiniens ont été tués dans la contre-offensive israélienne à Gaza, là aussi principalement des civils d’après le ministère de la Santé du Hamas, des données jugées crédibles par l’ONU.
Un bilan effroyable après un an et deux mois d’affrontements, qui explique la vigueur des propos du Pape François. Au-delà des aspects militaires et sécuritaires mis en avant par Israël, c’est bien l’ampleur de la tragédie humaine et la souffrance des civils, en particulier des enfants, qui scandalisent le souverain pontife.
Le Pape, une voix qui porte sur la scène internationale
En condamnant à deux reprises et publiquement la « cruauté » des bombardements israéliens à Gaza, le Pape François utilise tout le poids moral de sa fonction pour braquer les projecteurs sur le sort des Palestiniens. Une prise de position courageuse face à un allié stratégique majeur des Occidentaux comme Israël.
Mais le souverain pontife semble déterminé à faire entendre un autre son de cloche que la rhétorique sécuritaire et le soutien quasi-inconditionnel dont bénéficie souvent l’État hébreu. Avec ses mots forts et son appel à ne pas détourner le regard de la souffrance des civils gazaouis, le Pape se pose en trouble-fête du narratif dominant et en conscience morale face à ce qu’il considère comme une tragédie humanitaire inacceptable.
Reste à voir si ses prises de position répétées parviendront à infléchir les rapports de force et les calculs géostratégiques à l’œuvre dans ce conflit endémique. Mais dans l’immédiat, François réussit en tout cas à maintenir un sujet épineux à l’agenda international et à faire résonner un message d’humanité au cœur du fracas des armes.
