Dans un nouveau signe de dégradation des relations entre la France et le Niger, le régime militaire au pouvoir à Niamey a retiré mardi l’autorisation d’exercer à l’ONG française Acted. Cette décision, dont les motifs n’ont pas été précisés, s’ajoute à une longue liste de prises de position hostiles à la France de la part des nouvelles autorités nigériennes.
L’ONG Acted Persona Non Grata au Niger
Selon un arrêté du ministère nigérien de l’Intérieur consulté par l’AFP, “l’autorisation d’exercice accordée à l’ONG dénommée Agence d’Aide à la Coopération et au Développement – Acted (…) est retirée” à compter de mardi. Le document, signé par le ministre, le général Mohamed Toumba, n’apporte aucune précision sur les raisons de cette sanction. Une autre ONG locale, Action pour le Bien-Être (APBE), a été visée par une mesure similaire.
Une Décision Saluée par les Partisans du Régime
Sur les réseaux sociaux, des voix favorables au régime ont salué cette décision. Ibrahim Bana, une personnalité influente sur Facebook, a ainsi déclaré : “La marche vers la souveraineté nationale est en pleine progression au Niger ! Le retrait des agréments de certaines ONG, dont les actions ne s’alignent pas avec les priorités de notre peuple, est un signal fort. Le Niger montre ainsi qu’il est maître de son destin, que l’aide internationale doit respecter notre vision, nos valeurs, et nos besoins.“
Un Virage Souverainiste et Anti-Occidental Depuis le Coup d’État
Depuis leur arrivée au pouvoir par un putsch en juillet 2023, les généraux à la tête du Niger ont multiplié les prises de position hostiles à l’Occident, et particulièrement à la France, au nom de la défense de la souveraineté nationale. Parmi les mesures emblématiques, on peut citer :
- L’obtention du départ des soldats français et américains engagés dans la lutte anti-jihadiste
- L’expulsion de l’ambassadeur de France
- La fermeture du centre culturel franco-nigérien en tant qu’établissement binational
Acted Présente au Niger Depuis 2009
Implantée au Niger depuis 2009, l’ONG Acted intervenait dans plusieurs régions du pays pour “fournir une réponse d’urgence” aux populations déplacées, dans un contexte de violences jihadistes. En 2020, l’organisation avait été durement touchée par l’assassinat de six de ses jeunes humanitaires français, aux côtés de leur chauffeur et leur guide nigériens, dans une attaque jihadiste près de Niamey revendiquée par l’État islamique.
Suite à ce drame, Acted avait temporairement suspendu ses activités au Niger, mais s’était engagée à poursuivre sa mission dans le pays sur le long terme. Contactée par l’AFP, l’ONG n’a pas souhaité commenter la décision des autorités à ce stade.
Quel Avenir pour l’Aide Internationale au Niger ?
L’expulsion d’Acted soulève des questions sur l’avenir de l’action des ONG et plus largement de l’aide internationale au Niger. Le pays, parmi les plus pauvres au monde, fait face à d’immenses défis humanitaires et de développement. Mais le durcissement du régime envers les acteurs occidentaux pourrait compliquer la conduite des programmes sur le terrain.
Selon des observateurs, cette nouvelle illustration de la crispation des relations entre Niamey et Paris pourrait préfigurer d’autres décisions similaires dans les semaines à venir. La France, ex-puissance coloniale, apparait plus que jamais persona non grata aux yeux des militaires nigériens, déterminés à rompre avec des décennies de liens étroits.
Reste à voir si ce tournant souverainiste permettra réellement au Niger de s’affranchir de sa dépendance à l’aide extérieure et de tracer une voie plus autonome vers le développement, comme le promet le nouveau pouvoir. Ou si au contraire il risque d’isoler davantage ce pays déjà fragilisé, au cœur d’une région sahélienne en proie à une grave crise sécuritaire.