Dans un geste diplomatique significatif, le Premier ministre népalais Khadga Prasad Sharma Oli a entamé lundi une visite officielle de quatre jours en Chine, axée sur le renforcement de la coopération économique entre les deux pays. Cette initiative marque une rupture avec la tradition selon laquelle les nouveaux chefs d’État népalais réservent habituellement leur première visite à l’Inde voisine, soulignant ainsi un changement potentiel dans la dynamique géopolitique de la région.
Une visite placée sous le signe des investissements
Arrivé lundi soir dans la capitale chinoise, M. Oli a un agenda chargé pour ces quatre jours. Au programme : des rencontres avec le président Xi Jinping et le Premier ministre Li Qiang, un discours à la prestigieuse Université de Pékin, ainsi que la participation à un forum économique bilatéral. L’objectif affiché est clair : « renforcer la longue amitié » entre les deux pays, notamment dans le cadre des « Nouvelles routes de la soie », l’ambitieux projet chinois d’infrastructures à travers l’Eurasie et au-delà.
Selon une source proche du dossier, les discussions entre les dirigeants porteront sur des accords d’investissement antérieurs, comme celui concernant l’aéroport de la ville touristique de Pokhara, dont la construction vient de s’achever avec l’aide chinoise. Ces projets s’inscrivent dans le cadre de l’initiative des Nouvelles routes de la soie, lancée par Pékin en 2013 pour développer la connectivité commerciale de la Chine et sécuriser ses approvisionnements, tout en réalisant des investissements massifs dans de nombreux pays en développement.
Un équilibre délicat entre la Chine et l’Inde
Le choix de la Chine pour ce premier déplacement à l’étranger de M. Oli ne serait pas anodin. Selon certains médias népalais, il s’expliquerait par l’absence d’invitation officielle de New Delhi. Le Népal, coincé entre ses deux puissants voisins, cherche en effet à maintenir un équilibre délicat dans ses relations avec eux.
Khadga Prasad Sharma Oli, cadre dirigeant du Parti communiste népalais marxiste-léniniste unifié (CPN-UML), s’est souvent tourné vers Pékin pour réduire la dépendance historique de Katmandou à l’égard de New Delhi. Cependant, l’Inde reste le premier partenaire commercial du Népal, représentant 65% de son commerce extérieur en 2023-2024, contre 15% pour la Chine. Les investissements indiens au Népal surpassent également ceux de la Chine, avec respectivement 714 millions et 238 millions d’euros l’an dernier.
Une influence chinoise grandissante
Malgré cela, la Chine et le Népal ont approfondi leur coopération ces dernières années, et les entreprises chinoises dominent désormais certains secteurs clés du marché népalais, comme celui des véhicules électriques (70%). Cette visite du Premier ministre Oli pourrait donc marquer une nouvelle étape dans le renforcement des liens économiques sino-népalais.
Reste à savoir comment l’Inde réagira à ce rapprochement entre Katmandou et Pékin. New Delhi considère traditionnellement le Népal comme faisant partie de sa sphère d’influence, et voit d’un mauvais œil l’ingérence chinoise dans ce qu’elle considère comme son « arrière-cour ». La visite de M. Oli en Chine pourrait donc avoir des répercussions sur l’équilibre géopolitique délicat que le Népal tente de maintenir entre ses deux puissants voisins.
« Le Népal cherche à tirer le meilleur parti de sa situation géographique, en jouant la carte de la coopération économique avec la Chine tout en essayant de préserver ses liens historiques avec l’Inde. C’est un exercice d’équilibriste délicat, mais nécessaire pour le développement du pays. »
– Un expert des relations internationales
En conclusion, cette visite du Premier ministre népalais en Chine revêt une importance symbolique et économique significative. Elle témoigne de la volonté de Katmandou de diversifier ses partenariats et de tirer profit des opportunités offertes par l’initiative chinoise des Nouvelles routes de la soie. Cependant, elle soulève également des questions quant à l’évolution de la dynamique géopolitique dans la région, et à la capacité du Népal à maintenir un équilibre entre ses deux puissants voisins. Les prochains mois seront sans doute déterminants pour saisir les implications à long terme de ce rapprochement sino-népalais.