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Le naufrage d’un chalutier de migrants secoue la Grèce !

C’est un procès hors norme qui s’est ouvert ce mardi devant un tribunal grec. Neuf ressortissants égyptiens sont accusés d’être impliqués dans l’un des naufrages de migrants les plus meurtriers en Méditerranée. Ce drame, qui a eu lieu il y a près d’un an au large de la Grèce, a fait plus de 80 morts et quelque 600 disparus. Mais de nombreuses questions demeurent sur les circonstances exactes du naufrage et les responsabilités dans ce terrible bilan.

Un chalutier surchargé, une tragédie annoncée

Les faits remontent à la nuit du 13 au 14 juin 2023. L’Adriana, un vieux chalutier de pêche parti de Libye avec plus de 750 personnes entassées à son bord selon l’ONU, chavire dans les eaux internationales au large de la Grèce. La plupart des passagers étaient originaires du Pakistan. Seuls une centaine ont survécu, et à peine 82 corps ont pu être repêchés. C’est l’un des pires drames de l’immigration clandestine en Méditerranée de ces dernières années.

Mais très vite, des questions se posent sur les circonstances de l’accident et la gestion des secours. Des signalements avaient été faits aux garde-côtes grecs sur la présence de ce bateau surchargé et en difficulté dans leur zone de responsabilité. Pourtant, ils n’ont pas réagi immédiatement. Quand ils sont intervenus, il était trop tard. Pour les avocats des accusés, les autorités grecques ont une lourde part de responsabilité dans l’ampleur de la catastrophe.

Des rescapés sous le choc arrêtés et accusés

Neuf rescapés égyptiens de ce naufrage, âgés de 21 à 37 ans, ont été arrêtés à peine 24h après avoir été sauvés des eaux. Ils sont accusés d’être des passeurs et risquent la prison à perpétuité pour homicide par négligence et appartenance à une organisation criminelle. Mais pour leurs avocats, ce sont des boucs émissaires, désignés à la hâte sur la foi de témoignages de rescapés encore traumatisés et sous la pression de la police.

Nos clients étaient encore sous le choc. Et tout d’un coup, ils ont été arrêtés sans comprendre pourquoi !

– Maître Effie Doussi, avocate de la défense

De graves vices de procédures sont dénoncés dans l’enquête, menée dans la précipitation. Les accusés clament leur innocence, affirmant être venus en Europe pour un avenir meilleur. Pour les associations d’aide aux migrants, il s’agit d’un procès politique destiné à détourner l’attention des vrais responsables.

Que s’est-il vraiment passé cette nuit-là ?

De nombreuses zones d’ombres entourent encore ce naufrage. Pourquoi les garde-côtes grecs ont-ils tant tardé à intervenir malgré les signalements ? Selon des médias et ONG, leur passivité serait en cause dans le chavirement du bateau. Certains rescapés affirment même que les secours ont voulu remorquer le chalutier, provoquant l’accident. Une thèse réfutée par les autorités grecques, pour qui les migrants auraient refusé l’assistance.

Une enquête est en cours sur la gestion des opérations par les garde-côtes. Mais l’accès au dossier est verrouillé pour les avocats de la défense. En septembre, des dizaines de rescapés ont porté plainte contre les secours grecs. Athènes est régulièrement accusée de refouler illégalement les migrants à ses frontières. Le gouvernement rejette ces accusations et estime injuste la mise en cause des garde-côtes dans ce drame.

Au-delà du procès, les failles des politiques migratoires

Ce naufrage tragique et le procès qui s’ensuit mettent en lumière les failles et les impasses de la gestion des flux migratoires aux portes de l’Europe. Malgré les drames à répétition, des milliers de personnes continuent de risquer leur vie sur des embarcations de fortune pour fuir la misère et les conflits. En l’absence de voies légales et sûres, les passeurs font leur commerce sur la détresse humaine.

Face à cette crise humanitaire, l’Union Européenne peine à afficher une ligne claire, écartelée entre devoir d’accueil et tentation du repli. Les pays en première ligne comme la Grèce et l’Italie, débordés, se sentent souvent bien seuls. Malgré quelques timides progrès, la solidarité et la coordination européennes restent insuffisantes. Et sur le terrain, les ONG tentent de pallier les manquements étatiques pour assurer les secours en mer.

Au final, ce procès apparaît comme un révélateur des paradoxes et des hypocrisies des politiques migratoires européennes. S’il faut évidemment juger les éventuels passeurs, une répression aveugle ne résoudra rien sans une refonte en profondeur de l’approche globale de la question. Seule une action coordonnée et humaniste, s’attaquant aux causes profondes des migrations et ouvrant des voies sûres, pourra éviter que la Méditerranée ne reste un cimetière pour ceux qui tentent de la traverser au péril de leur vie.

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