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Le Musée Africain de Macron Prend Forme Malgré les Défis

Le musée africain voulu par Macron a déjà une directrice, un budget et des employés avant même son lieu définitif. Retour sur un projet né d'une volonté de réparation post-coloniale, mais confronté à de nombreux défis politiques et logistiques. Arrivera-t-il à bon port ?

Né d’une promesse présidentielle en 2021, le projet de musée dédié aux cultures africaines porté par Emmanuel Macron se concrétise peu à peu, malgré un parcours semé d’embûches. Rebaptisé “Maison des mondes africains” ou MansA, cet ambitieux lieu pluridisciplinaire dispose déjà d’une directrice, d’une équipe d’une dizaine de personnes, d’un budget conséquent et même d’un logo. Seule une pièce manque encore au puzzle : son emplacement définitif dans la capitale.

Porté à l’origine par l’historien camerounais Achille Mbembe, à qui le chef de l’État avait commandé un rapport sur le renouvellement des relations entre l’Afrique et la France, le musée se veut un geste fort de réparation post-coloniale. “L’idée était de redonner une chance à la France à un moment où elle est chahutée en Afrique et paie les errements des gouvernements successifs”, explique l’universitaire à l’AFP. Pour mener à bien cette mission, le choix s’est porté sur la journaliste et réalisatrice Élisabeth Gomis, ancienne adjointe de la commissaire d’exposition Ngoné Fall pendant la Saison Africa 2020.

Un parcours du combattant pour trouver un toit

Mais avant même de pouvoir déployer sa programmation artistique et pédagogique, la MansA a dû se confronter à un défi de taille : dégoter un écrin à la mesure de ses ambitions, dans un contexte immobilier parisien saturé. Après avoir un temps lorgné la Bourse de commerce, finalement attribuée à la Collection Pinault, l’établissement a failli poser ses valises dans le bâtiment de la Fondation Cartier, promis à un déménagement. Las, le lieu s’est avéré trop étroit pour accueillir à la fois des espaces d’exposition, de spectacle vivant, de création, de documentation et de rencontres professionnelles.

C’est finalement du côté de la vénérable Monnaie de Paris, quai de Conti, qu’une solution a émergé. Un accord a été trouvé pour héberger la MansA dans une partie des locaux de cette institution historique, en partageant certains espaces comme les salons d’expositions. Une cohabitation qui ne va pas sans frictions, les salariés de la Monnaie craignant de perdre leur identité culturelle propre. Une réunion houleuse s’est tenue mi-octobre pour tenter d’apaiser les esprits.

Sauvé in extremis des remous politiques

Pour corser encore l’affaire, la crise politique ouverte par la dissolution surprise de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin 2024 a bien failli couler définitivement le projet. Privé de son principal soutien élyséen, le musée africain s’est retrouvé brutalement en haut de la pile des dossiers susceptibles de passer à la trappe. Il aura fallu toute l’opiniâtreté de sa directrice et la mobilisation des réseaux culturels et diplomatiques pour arracher un arbitrage in extremis en sa faveur.

Malgré ces vents contraires, Élisabeth Gomis veut croire que la MansA trouvera son public et sa place singulière dans le paysage muséal français. Loin d’un musée classique, le lieu entend questionner les enjeux contemporains des sociétés africaines et de leurs diasporas, en s’appuyant sur la création vivante et le dialogue entre disciplines. Un positionnement original à l’heure où le débat fait rage sur la restitution des œuvres d’art spoliées pendant la colonisation.

Il ne s’agit pas de parler à la place des Africains mais bien de concevoir ce projet avec eux, en cherchant de nouvelles voix et de nouveaux regards. C’est toute la philosophie de la MansA.

Élisabeth Gomis, directrice de la “Maison des mondes africains”

En attendant de pouvoir poser définitivement ses valises quai de Conti, après d’importants travaux prévus pour adapter les lieux à ses besoins, l’équipe de la MansA fourmille déjà de projets : expositions itinérantes, résidences d’artistes, programmes de recherche, web radio, incubateurs pour les entrepreneurs culturels africains… Autant de pistes pour inventer, loin des schémas classiques, un musée résolument ancré dans son époque et tourné vers l’avenir du continent. Le pari d’un soft power culturel renouvelé entre l’Afrique et la France.

Les chiffres clés du projet MansA

  • Un budget de fonctionnement de 5 à 7 millions d’euros par an
  • Une surface de 4000 m2 à la Monnaie de Paris
  • Une équipe d’une dizaine de salariés
  • Ouverture prévue courant 2026

Malgré les embûches et les doutes, le projet présidentiel d’un grand musée dédié aux cultures africaines continue donc peu à peu de prendre forme. Pour ses promoteurs, il en va de la crédibilité de la France sur la scène internationale, mais aussi de sa capacité à repenser en profondeur son rapport à l’Afrique, loin des ornières du passé. Un sacré défi, qui promet encore bien des rebondissements d’ici l’ouverture espérée des portes de la MansA à l’horizon 2026. La gestation s’annonce intense.

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