Le monde de l’art contemporain est en deuil. André-Pierre Arnal, peintre majeur du mouvement Supports-Surfaces, s’est éteint le 10 juillet 2024 à l’âge de 84 ans. Né à Nîmes en 1939, l’artiste cévenol laisse derrière lui une œuvre foisonnante et haute en couleur, marquée par l’expérimentation constante des supports et des techniques picturales.
Un artiste pionnier de Supports-Surfaces
Avec Claude Viallat, Noël Dolla ou encore feu Jean-Pierre Pincemin, André-Pierre Arnal fut l’un des pionniers du groupe Supports-Surfaces. Né à la fin des années 1960, ce mouvement radical entendait déconstruire les codes traditionnels de la peinture en se focalisant sur ses composantes essentielles : la toile, le châssis, la couleur.
Dès 1970, Arnal expose ses premières toiles libres lors d’happenings en plein air, comme “Cent artistes dans la ville” à Montpellier. Refusant l’individualisme de l’artiste, il explore avec ses comparses de nouvelles façons de créer et de montrer la peinture, en investissant l’espace public.
Monotypes, pliages et teintures sur toile libre
Le travail d’André-Pierre Arnal se distingue par une recherche incessante sur les matériaux et les gestes du peintre. À partir de ses premiers monotypes, l’artiste développe un vocabulaire plastique original basé sur le pliage, le froissage, la teinture ou encore l’utilisation de pochoirs sur des toiles libérées du châssis.
Cette approche du “dessus des cartes” comme il l’appelait, donne naissance à des séries de peintures abstraites, comme autant de fragments d’un grand ensemble se déployant dans l’espace. Géométries douces, couleurs lumineuses, matières sensibles : la peinture d’Arnal invite à une expérience à la fois visuelle et tactile.
Un coloriste des Cévennes à Montpellier
Si André-Pierre Arnal a beaucoup exposé à Paris, notamment avec la galerie Ceysson & Bénétière, c’est du côté de Montpellier qu’il faut chercher pour voir ses plus belles pièces. Le musée Fabre, qui avait accroché ses grandes compositions pour sa réouverture en 2021, possède un exceptionnel fonds Arnal de huit toiles.
Imprégné de culture méditerranéenne, baignée dans les paysages bas-Languedociens et Cévenols, André-Pierre Arnal tire de sa double formation, littéraire et plastique, une activité duelle unissant peinture et écriture.
– Galerie Ceysson & Bénétière
Car l’œuvre d’Arnal ne peut se comprendre sans son ancrage méridional, entre garrigue et Méditerranée. Les couleurs chaudes et les formes épurées de ses toiles font écho aux paysages qui ont bercé son enfance à Nîmes puis sa vie d’artiste entre Paris et les Cévennes.
Une œuvre à (re)découvrir
Avec la disparition d’André-Pierre Arnal, c’est une page de l’histoire de l’art contemporain qui se tourne. Mais son héritage pictural, aussi coloré que profond, mérite plus que jamais d’être exploré par le public. Quelques rendez-vous pour (re)découvrir son travail :
- L’exposition “André-Pierre Arnal, une collection”, au musée Fabre de Montpellier, présente le fonds de 8 toiles de l’artiste.
- La galerie Ceysson & Bénétière, qui a beaucoup exposé Arnal, lui rend hommage dans son duo show avec Ted Gahl visible jusqu’au 26 juillet à New York.
- Les éditions Snoeck ont publié en 2021 une belle monographie “André-Pierre Arnal”, retraçant 60 ans de création picturale.
Nul doute que musées et galeries sauront célébrer la mémoire de ce grand coloriste, pour que vibre encore longtemps la poésie de ses toiles libres. André-Pierre Arnal laisse une œuvre généreuse et lumineuse, à l’image de ce Supports-Surfaces dont il fut l’un des plus beaux représentants.