Le 1er décembre 1944, un évènement tragique se déroulait à Thiaroye, près de Dakar au Sénégal. Ce jour-là, l’armée coloniale française ouvrait le feu sur des tirailleurs sénégalais, faisant de nombreuses victimes. 80 ans plus tard, le pays entame un travail de mémoire pour honorer ces soldats africains et inscrire ce douloureux épisode dans l’histoire collective.
La Lumière sur un Massacre Longtemps Occulté
Pendant des décennies, le massacre de Thiaroye est resté dans l’ombre, absent des livres d’histoire et méconnu du grand public. Mais les récentes commémorations marquant le 80ème anniversaire de la tragédie témoignent d’une volonté de faire la lumière sur ces évènements.
Le 1er décembre 1944, plus de 1600 tirailleurs étaient rassemblés dans un camp à Thiaroye, de retour des combats de la Seconde Guerre mondiale. Ils réclamaient le paiement de leurs arriérés de soldes et diverses primes. C’est alors que les forces coloniales ont ouvert le feu, faisant officiellement 35 morts selon les autorités françaises de l’époque. Mais des historiens estiment que le bilan serait bien plus lourd, allant jusqu’à plusieurs centaines de victimes.
Vers une Reconnaissance dans les Programmes Scolaires
Malgré l’ampleur du drame, le massacre de Thiaroye est longtemps resté absent de l’enseignement scolaire sénégalais. Une forme d’effacement à laquelle veulent remédier les nouvelles autorités en place depuis avril, portées par le souverainisme et le panafricanisme.
Dans le programme officiel, le massacre des tirailleurs de Thiaroye n’est pas enseigné comme cours.
Mamadou Sané, professeur d’histoire
Aujourd’hui, si le sujet n’est pas abordé directement, les enseignants peuvent proposer aux élèves de travailler dessus sous forme de dossiers pédagogiques. Un premier pas, en attendant une intégration plus concrète dans les programmes. Un enjeu majeur pour ancrer cet évènement dans la mémoire collective du pays.
Un Devoir de Mémoire qui s’Amorce
Au-delà des bancs de l’école, c’est tout un travail mémoriel qui se met en place. La participation du président Macky Sall à la cérémonie officielle de commémoration ce 1er décembre marque une étape importante. Selon l’historien Mamadou Diouf, cela «sort le Sénégal du silence coupable et complice, fermement imposé par la France aux régimes successifs» du pays.
D’autres initiatives émergent pour faire connaître l’histoire des tirailleurs de Thiaroye au grand public :
- Colloque scientifique international les 2 et 3 décembre
- Création de fiches pédagogiques pour les enseignants
- Projet de bibliothèques accessibles avec toute la documentation sur le sujet
Des Zones d’Ombre Persistent
Si la lumière commence à se faire, le massacre de Thiaroye conserve encore une part de mystère. Le nombre exact de victimes reste inconnu, tout comme le lieu où reposent les corps des tirailleurs tombés sous les balles ce 1er décembre 1944.
Des questions qui taraudent encore les familles et les historiens. Le combat pour la vérité et la reconnaissance est encore long. Mais en institutionnalisant la mémoire de cette tragédie, le Sénégal ouvre la voie vers une nécessaire réconciliation avec son passé.
La commémoration du 80ème anniversaire du massacre de Thiaroye représente un tournant. Après des décennies de silence, le pays se saisit de son histoire pour honorer la mémoire de ces tirailleurs tombés injustement. Un premier pas vers la lumière, pour ne jamais oublier.