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Le Maroc nie tout lien avec l’arrestation d’un espion présumé en Allemagne

Rebondissement dans l'affaire d'espionnage marocain en Allemagne : Rabat nie tout lien avec le suspect arrêté et le qualifie d'"activiste radical" hostile au royaume. De quoi tendre davantage les relations entre les deux pays ?

La récente arrestation en Allemagne d’un ressortissant marocain soupçonné d’espionnage continue de faire des vagues. Mais le royaume chérifien a tenu à prendre ses distances, niant vendredi tout lien entre le suspect et ses propres services de renseignement.

Un « activiste radical » hostile au Maroc selon Rabat

Loin d’être un agent secret, Youssef El A., interpellé mercredi à l’aéroport de Francfort, serait en réalité un opposant virulent au régime marocain. C’est ce qu’a affirmé à l’AFP une source sécuritaire marocaine sous couvert d’anonymat :

Ce Marocain n’a aucun lien avec les services secrets marocains et n’a jamais collecté des informations pour eux. Il a une posture à la fois virulente et haineuse contre le royaume.

Selon cette même source, le mis en cause ferait partie des éléments les plus radicaux du Hirak du Rif, un mouvement de contestation qui a secoué cette région du Nord-Est marocain en 2016-2017. Il appartiendrait à la frange dite des « Républicains », qui aurait reçu le soutien de l’Algérie, grande rivale régionale du Maroc, allant jusqu’à ouvrir un « parti national rifain » à Alger en 2024.

Accusations d’espionnage de militants du Hirak en Allemagne

Youssef El A. est soupçonné par le parquet fédéral allemand d’avoir espionné depuis janvier 2022 des militants du Hirak exilés outre-Rhin. Il aurait agi de concert avec un autre Marocain, Mohamed A., condamné en 2023 à 1 an et 9 mois de prison avec sursis par le tribunal de Düsseldorf pour des faits similaires.

En échange d’informations collectées pour les services secrets marocains, ce dernier aurait obtenu des billets d’avion pour ses voyages personnels. Quant à Youssef El A., arrêté le 1er décembre 2024 en Espagne suite à un mandat d’arrêt européen, il a été extradé vers l’Allemagne où un juge a ordonné son placement en détention provisoire.

Le mouvement du Hirak, cible de la répression marocaine

Rappelons que le Hirak est né en octobre 2016 après le décès tragique d’un vendeur de poissons broyé dans une benne à ordures alors qu’il tentait de s’opposer à la saisie de sa marchandise. Ce drame avait provoqué un vaste mouvement de protestation à caractère socio-économique.

Depuis, des centaines de militants ont été emprisonnés selon des associations, avant d’être libérés après avoir purgé leur peine ou d’être graciés. Cette affaire d’espionnage présumé illustre la volonté des autorités marocaines de garder un œil sur les activistes du Hirak, y compris ceux ayant trouvé refuge à l’étranger.

Des relations tendues entre Rabat et Berlin

Cette nouvelle affaire risque en tout cas de jeter un froid supplémentaire sur les relations maroco-allemandes. Celles-ci traversent une zone de turbulences depuis que Berlin a critiqué la répression du Hirak et remis en cause la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental, ex-colonie espagnole que Rabat considère comme une partie intégrante du royaume.

En s’empressant de nier publiquement tout lien entre ses services secrets et le suspect, le Maroc cherche manifestement à éteindre ce nouveau foyer de tensions avec l’Allemagne. Reste à savoir si cette stratégie suffira à apaiser les relations bilatérales, alors que le procès de Youssef El A. promet de faire resurgir le dossier sensible du Hirak.

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