Mohamed Boudjellaba, le maire écologiste de Givors, une commune de la métropole de Lyon, se retrouve au cœur d’une polémique sur la liberté d’expression. En janvier dernier, il avait refusé de publier dans le journal municipal une tribune de Fabrice Riva, conseiller municipal d’opposition, accompagnée d’une caricature le représentant en train de gifler un homme en lançant “Bâtard ! Vive le FLN !”. Une censure que l’élu a contesté en justice, obtenant gain de cause.
Un dessin jugé offensant mais pas diffamatoire
Si Mohamed Boudjellaba avait jugé le dessin “offensant”, le tribunal administratif de Lyon a estimé dans une décision du 22 octobre qu’il n’était pas diffamatoire. Les magistrats ont en effet relevé que le maire avait lui-même reconnu avoir traité un élu d’opposition de “bâtard”. Quant à la gifle, elle fait référence à une altercation physique qui l’a opposé à un chef d’entreprise en mars 2022, un fait “de notoriété publique” selon le tribunal.
Le droit des élus d’opposition réaffirmé
Au-delà de son aspect anecdotique, ce jugement réaffirme le droit des élus d’opposition de s’exprimer librement dans les supports de communication des collectivités, y compris de manière satirique ou provocante. Un droit encadré par la loi, qui prévoit un espace réservé à leur expression dans les publications municipales.
La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme
Article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789
Un équilibre délicat entre liberté d’expression et respect
Pour autant, cette liberté d’expression n’est pas sans limite. Les propos tenus par les élus dans ces tribunes ne doivent pas être injurieux, diffamatoires ou appelant à la haine ou la violence. Un équilibre parfois délicat à trouver, source de fréquents contentieux devant les tribunaux administratifs. D’autant que l’humour et la caricature, par nature provocants, peuvent être diversement appréciés.
Une décision qui fera jurisprudence
En jugeant que ce dessin n’excédait pas les limites admissibles de la liberté d’expression, au regard des faits avérés qu’il dénonçait sur un ton satirique, le tribunal administratif de Lyon apporte une précision importante. Sa décision, si elle n’est pas contestée en appel, est susceptible de faire jurisprudence et de guider les prochains arbitrages en la matière.
Le débat relancé à l’approche des municipales
Cette polémique intervient alors que la campagne pour les élections municipales de 2026 s’annonce, ravivant les tensions entre majorité et opposition dans de nombreuses villes. La place accordée à la contradiction dans la communication institutionnelle des municipalités s’impose comme un enjeu démocratique de premier plan, que cette affaire remet en lumière.
Vers un nouveau code de bonne conduite ?
Pour éviter la multiplication des contentieux, certains appellent à la rédaction d’un “code de bonne conduite” clarifiant les droits et devoirs des élus dans leurs expressions publiques. Une piste également évoquée par des associations d’élus, qui pourrait utilement dépassionner ces situations conflictuelles. En attendant, gageons que le maire de Givors se conformera à la décision de justice, en publiant, même à contrecœur, la fameuse caricature dans les pages du prochain bulletin municipal.