Il y a vingt ans, Jean-Pierre Raffarin instaurait le lundi de Pentecôte comme une “journée de solidarité et de fraternité”, en réponse à la canicule meurtrière de 2003 qui avait particulièrement touché les personnes âgées isolées. Mais que reste-t-il aujourd’hui de cet élan de générosité nationale ? Le sens de cette journée semble s’être quelque peu perdu…
Un symbole fort qui s’est étiolé avec le temps
À l’origine, cette journée devait illustrer les valeurs de solidarité et de fraternité si chères à la France, tout en permettant de financer la prise en charge des personnes âgées et handicapées via une journée de travail non rémunérée. Une belle initiative en théorie, mais qui semble avoir perdu de sa substance avec les années.
L’avenir de la France n’est pas d’être un immense parc de loisirs.
– Jean-Pierre Raffarin, en 2003
Beaucoup de Français voient désormais ce lundi travaillé comme une contrainte de plus, loin de l’esprit de cohésion sociale initialement prévu. Un symbole de cette évolution : de nombreuses entreprises autorisent maintenant leurs salariés à poser un jour de RTT à cette date.
Le défi du vieillissement, vingt ans après
Malgré tout, la question de la prise en charge de nos aînés reste plus que jamais d’actualité. Avec le papy-boom, la France doit faire face à un véritable défi démographique et sociétal. Les personnes âgées sont de plus en plus nombreuses et isolées, nécessitant une solidarité accrue.
- En 2060, un Français sur trois aura plus de 60 ans (contre un sur quatre aujourd’hui).
- 4 millions de personnes âgées seront en perte d’autonomie en 2050 (contre 2,5 millions actuellement).
Face à ces chiffres, il apparaît crucial de redonner du sens à cette journée de Pentecôte. Au-delà du simple financement, c’est toute une réflexion sur notre modèle de société qui doit être menée. Comment recréer du lien intergénérationnel ? Quelle place pour nos anciens ? Des questions essentielles pour l’avenir de notre pays.
Retisser les fils de la cohésion nationale
Plus globalement, les fractures qui traversent la société française interrogent la vitalité de nos valeurs républicaines. Individualisme croissant, repli communautaire, méfiance envers les institutions… Autant de maux qui minent notre cohésion nationale. Le lundi de Pentecôte pourrait être l’occasion de retisser ces liens distendus.
Il faut retrouver le sens du collectif, de la générosité, de l’attention à l’autre. C’est tout le défi d’une société inclusive et bienveillante.
– Marie-Anne Montchamp, ancienne secrétaire d’État aux Solidarités
Organiser des moments de partage et d’échange intergénérationnels, valoriser l’engagement bénévole, sensibiliser aux enjeux du grand âge… Les pistes ne manquent pas pour faire de ce lundi un véritable temps fort citoyen, au-delà du seul aspect financier.
Construire la France de demain
Vingt ans après sa création, le lundi de Pentecôte nous renvoie finalement à une question fondamentale : dans quelle société voulons-nous vivre demain ? Une société du chacun pour soi ou une France solidaire et fraternelle, fidèle à ses valeurs humanistes ?
L’enjeu est de taille car c’est notre modèle social qui est en jeu. Prendre soin de nos aînés, tisser des liens entre générations, réaffirmer notre attachement aux valeurs de solidarité… Autant de défis cruciaux pour façonner la France de demain. Et cela passe aussi par redonner du sens à cette journée de Pentecôte, en en faisant un véritable symbole du vivre-ensemble à la française.
Une chose est sûre : la question posée par Jean-Pierre Raffarin il y a 20 ans reste plus que jamais d’actualité. Non, l’avenir de la France n’est pas d’être un immense parc de loisirs. Mais il est encore temps d’écrire une autre histoire, celle d’une nation unie et solidaire. Et si ce lundi de Pentecôte en était le point de départ ?